mercredi, mai 1

« Dieu seul sait à quel point nous rêvions de ce jour ! » C’est par un message ému, publié sur les réseaux sociaux, que la ministre de l’égalité raciale du Brésil, Anielle Franco, a commenté la nouvelle qui a réveillé son pays, dimanche 24 mars au matin : l’arrestation par la police fédérale des trois commanditaires présumés de l’assassinat de sa sœur, Marielle Franco. Une avancée attendue depuis six années dans ce dossier.

L’annonce a eu lieu dix jours après l’anniversaire du meurtre, survenu le 14 mars 2018. Conseillère municipale de gauche, noire, LGBT et issue des favelas, Marielle Franco a trouvé la mort en compagnie de son chauffeur Anderson Gomes, fauchée dans sa voiture par une rafale de mitraillette à la sortie d’une réunion publique. L’affaire avait provoqué une immense émotion au Brésil ainsi qu’à l’étranger.

Les deux assassins présumés, Elcio de Queiroz et Ronnie Lessa, d’anciens policiers reconvertis en tueurs à gage, ont été arrêtés en mars 2019, mais les commanditaires du meurtre sont longtemps restés dans l’ombre. Les trois individus arrêtés ce dimanche par la police fédérale sont pourtant des figures importantes de la vie publique carioca. Dans l’ordre, on trouve les frères Domingos et Joao Francisco Inácio Brazao (dit « Chiquinho » Brazao), respectivement conseiller au Tribunal des comptes et député fédéral de Rio de Janeiro, mais aussi et surtout Rivaldo Barbosa : rien moins que l’ancien chef de la Police civile locale, un temps en charge de l’enquête sur le meurtre de Marielle Franco.

« Un long chemin à parcourir »

Voilà des années que la famille « Brazao » était suspectée d’être à l’origine de l’assassinat. Ex-conseiller municipal et député régional de Rio de Janeiro, Dominogs Brazao a déjà été poursuivi pour meurtre et accusé d’achats de voix (sans être condamné) mais a toujours nié son implication dans l’affaire Franco. « Il ne connaissait pas Marielle et n’avait aucun lien avec elle, (…) j’ai la certitude absolue qu’il est innocent », a déclaré son avocat à la presse dimanche.

Le CV des trois accusés en dit long sur l’effondrement d’une ville supposément « merveilleuse », où règnent des milices armées formées d’anciens policiers, où mafia et autorités publiques se confondent. « Cette enquête est fondamentale pour nous permettre de comprendre l’ampleur du gouffre dans lequel est tombé Rio », a commenté Marcelo Freixo, ex-député fédéral et proche de Marielle Franco.

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Le président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva avait fait de l’avancée de l’enquête sur le meurtre de « Marielle » une promesse de campagne. Tout l’inverse de son prédécesseur, Jair Bolsonaro, ex-député de Rio, qui a longtemps cultivé des liens étroits avec les représentants des milices de la ville. Selon la presse, le député « Chiquinho Brazao » aurait par ailleurs bénéficié sous sa présidence d’un passeport diplomatique. Les motivations exactes de l’assassinat restent néanmoins à déterminer. « Nous sommes plus près de la justice » mais « il reste un long chemin à parcourir », a souligné la ministre Anielle Franco.

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