lundi, mai 6
Des enfants de djihadistes dans le centre de déradicalisation d’Orkech, au Kurdistan syrien, image extraite du reportage « Fils de djihadistes : l’impossible retour ? », de Chris Huby et Guillaume Lhotellier.

FRANCE 2 – JEUDI 11 AVRIL À 21 H 10 – REPORTAGE

« On dit que la France a peur de nous. Mais on n’est pas comme vous croyez », assure, face caméra, Amza, né en 2002, à Toulouse. Il est un des quatre Français sur les cent détenus du centre de déradicalisation pour fils de djihadistes d’Orkech, au Kurdistan syrien. Avec lui : Adem, 21 ans, également originaire de Toulouse ; Youssef « 18 ou 19 ans », né à Strasbourg, et Elias, Franco-Marocain de « 19 ans à peu près ».

Mais alors qui sont ces fils de djihadistes ? Le réalisateur Chris Huby, qui suit le conflit syrien depuis 2011, a obtenu pour « Envoyé spécial » de filmer pour la première fois à l’intérieur de cette prison de haute sécurité et de s’entretenir avec ces « quatre gamins » – expression d’Adem. Il en rapporte un documentaire exceptionnel, aux témoignages d’une force rare, qui fait au minimum réfléchir, et porte l’espoir (jamais énoncé) de convaincre de la nécessité de les rapatrier.

Tous en rêvent. Adem est particulièrement observé parce qu’il est le fils de Fabien Clain, terroriste qui a revendiqué les attentats du 13 novembre 2015 à Paris (130 morts et 490 blessés). Adem condamne ces actes, avant de souligner : « Je n’ai rien à voir avec ça. »

Lire la critique (en 2021) : « Panda, la voix du djihad » sur France Inter, une enquête-fiction autour de Fabien Clain

Chacun se remémore son enfance agréable, avant d’être emmené par ses parents faire le djihad en Syrie. Elias a alors constaté les changements : « Ma mère a mis le niqab. Mon père est devenu plus dur. » Tous découvrent la guerre et ses horreurs. « J’ai vu quelqu’un couper la tête de quelqu’un d’autre. Tu vois ou pas ? », dit Amza, qui ponctue souvent ses phrases d’un « tu vois ? ».

Scènes du quotidien

Les entretiens alternent avec les scènes de leur quotidien, commencé à 7 heures. La salle de petit déjeuner est sale, sans chaises ni tables, et la nourriture peu engageante (le directeur confie manquer de moyens). Puis ils suivent trois heures de cours de déradicalisation par jour, en arabe, ainsi que des cours de mathématiques et d’anglais. Dispensés par des femmes, volontairement.

Lire aussi | « Kylian, 13 ans : la vie après Daech », sur BFM-TV : le pari de la réinsertion d’un enfant rapatrié de Syrie

Parallèlement, leurs vies se dévoilent par bribes, ou plutôt par chocs successifs. Comme cette vidéo de propagande montrant deux enfants de 9 et 11 ans, qui peinent à tenir leur kalachnikov : ce sont Youssef et Amza. « J’étais petit, je réfléchissais pas », dit Youssef. Amza sera, lui, enrôlé dans les « lionceaux du califat », brigade de deux mille enfants-soldats, avant d’aller au combat. « Ce n’était plus un jeu. » Il en garde plusieurs éclats d’obus dans le crâne, qu’il faudrait opérer ; Adem et Youssef aussi ont été blessés.

Le commentaire reste sobre. « La déradicalisation va prendre des années pour certains. » On pense alors à la question que posera plus tard Amza : comment sait-on si quelqu’un est déradicalisé ? Il a sa réponse : « Prends-moi en France, mets-moi dans un centre et tu vas voir. »

Fils de djihadistes : l’impossible retour ?, reportage de Chris Huby et Guillaume Lhotellier (Fr., 2024, 26 min). Diffusé dans le cadre du magazine « Envoyé spécial » présenté par Elise Lucet sur France 2 et disponible en replay sur France.tv.

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