jeudi, mai 2

Admirablement digne deux heures après avoir appris la mort de son mari par les médias russes, le 16 février, Ioulia Navalnaïa a demandé aux élites de la défense et de la diplomatie occidentales, réunies à Munich, que Vladimir Poutine soit « tenu responsable » et que lui et son régime soient « punis » pour ce crime. Quelques heures plus tard, le président des Etats-Unis, Joe Biden, lui a fait écho en attribuant la responsabilité de la mort d’Alexeï Navalny au président russe, dont il a dénoncé la « brutalité » et les « crimes de guerre ». « L’histoire regarde », a ajouté M. Biden en guise d’avertissement.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés A Munich, la dignité de Ioulia Navalnaïa, la veuve d’Alexeï Navalny : « Ils seront punis »

Si l’histoire regarde, elle ne doit pas être très impressionnée. Car elle se souvient sans doute qu’il y a trois ans, le même président Biden avait mis en garde le Kremlin contre « des conséquences dévastatrices » si Navalny venait à mourir en prison. Elle se souvient aussi qu’en 2013 le président Barack Obama, dont Joe Biden était le vice-président, avait fixé une « ligne rouge » à Damas : le recours à l’arme chimique. Et que, lorsque le dictateur Bachar Al-Assad a utilisé l’arme chimique contre sa propre population, Obama n’a pas mis sa menace à exécution. L’histoire regarde. Elle n’oublie pas.

L’indignation des Occidentaux, palpable à Munich, face au sort réservé à Navalny, perçu à la fois comme un assassinat et comme une provocation, est sincère. Mais elle les conduit inévitablement à la douloureuse question : punir Poutine, oui, mais comment ? Au moins, la question est-elle maintenant posée ; il y a dix ans, lorsque Vladimir Poutine a annexé la Crimée, l’administration Obama avait conseillé aux nouvelles autorités de Kiev de ne pas résister. La punition pour cette violation flagrante du droit international et de l’inviolabilité des frontières avait été légère, sous forme de sanctions minimales.

« Echec cuisant »

Alors, que faire ? La première idée qui vient à l’esprit des responsables concerne, justement, les sanctions. « On a déjà des sanctions en place, mais oui, nous en envisageons d’autres », a indiqué Joe Biden sans plus de précisions. Même son de cloche parmi certains Européens. Sauf que, le moment venu, lundi 19 février, les ministres des affaires étrangères des Vingt-Sept ont reculé devant l’obstacle d’un treizième paquet de sanctions – douze ont déjà été adoptés depuis l’invasion de l’Ukraine à grande échelle, le 24 février 2022.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Après deux ans de sanctions contre Moscou, l’UE s’efforce de limiter leur contournement

Le problème est que l’efficacité de ces sanctions, incomparablement plus sévères que celles de 2014, est sérieusement mise en doute au bout de deux ans. « Echec cuisant », juge le chercheur Shahin Vallée. Il est difficile de nier que le prix plafond de 60 dollars le baril, par exemple, fixé par le G7 au pétrole russe en 2022 mais massivement contourné par les pays importateurs, notamment l’Inde et la Chine, n’a pas produit l’effet escompté. L’économie russe résiste, même s’il y a lieu de douter de la validité de toutes ses statistiques.

Il vous reste 50.96% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version