jeudi, mai 9

Depuis sept ans qu’Emmanuel Macron est président de la République, plusieurs réformes ont concerné l’éducation nationale et l’enseignement supérieur, mais aucune n’a porté sur l’inégalité des chances d’accès aux études supérieures. A titre de comparaison, au Royaume-Uni, dès son arrivée au pouvoir en 1997, le premier ministre travailliste Tony Blair avait lancé une grande politique publique sur ce sujet nommée « Aimhigher ». Entre 1997 et 2011, le gouvernement britannique a distribué l’équivalent de plus de 3 milliards d’euros aux établissements d’enseignement supérieur et à des écoles secondaires, dans l’objectif d’inciter toute une classe d’âge de jeunes défavorisés à entreprendre des études porteuses de débouchés professionnels.

A l’heure où le gouvernement s’apprête à amputer le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche de 900 millions d’euros, on peut s’étonner de l’absence d’un investissement similaire en France. Deux motifs justifient la mise en place d’une politique publique d’égalité des chances pour l’accès aux études supérieures : la justice sociale et l’opportunité économique.

D’abord, le constat d’un fossé persistant entre les jeunes favorisés et défavorisés dans l’accès aux diplômes postbac. L’Observatoire des inégalités relève, sur la base de données issues de l’éducation nationale, que si les enfants d’ouvriers représentent au collège la même proportion que les enfants de cadres (23 %), ils ne représentent plus que 10 % des étudiants à l’université (33 % pour les enfants de cadres) et seulement 7 % des élèves des classes préparatoires aux grandes écoles (53 % pour les enfants de cadres).

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Une part importante de ces inégalités s’ancre dans les différentes aspirations développées par les jeunes selon leur environnement social et territorial. Un sondage effectué en novembre 2023 par l’Institut ViaVoice pour six associations d’égalité des chances révèle que, à 15-16 ans, seulement 18 % des enfants modestes ruraux et 37 % des enfants modestes urbains pensent pouvoir intégrer une grande école contre 48 % des favorisés ruraux et 56 % des favorisés urbains.

Défense d’une « économie de la connaissance »

Une seconde raison de mener une politique ambitieuse de réduction de l’inégalité des chances vient de la poursuite d’une économie de l’innovation avec le plan France 2030 porté par le secrétariat général pour l’investissement. Déjà, Tony Blair puis son successeur Gordon Brown défendaient une « économie de la connaissance » exigeant de faire monter en compétences académiques et professionnelles toute une classe d’âge. En France aussi, le dynamisme économique ne peut plus reposer aujourd’hui sur une logique d’accès au diplôme excluant massivement les jeunes de familles modestes. Comme le souligne l’économiste Xavier Jaravel dans son dernier ouvrage, « démocratiser l’accès aux carrières de l’innovation est une réforme décisive » (Marie Curie habite dans le Morbihan, Seuil, 2023).

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