samedi, avril 27

Les homes indiens de Guyane, huit au total, étaient des pensionnats créés et dirigés par l’Eglise catholique et soutenus par l’Etat depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Des enfants issus des communautés autochtones, dont le nombre est évalué à 2 000, y furent placés en internat, pour être scolarisés, alors qu’ils étaient âgés de 4 ans à 16 ans. La plus forte activité des homes s’étend de la fin des années 1940 au début des années 1980, mais le dernier d’entre eux n’a fermé qu’en 2023.

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Alexis Tiouka, ancien pensionnaire et juriste kali’na, ainsi que l’ouvrage d’Hélène Ferrarini Allons enfants de la Guyane. Eduquer, évangéliser, coloniser les Amérindiens dans la République (Anacharsis, 2022) ont contribué à introduire le passé des homes indiens dans l’espace et le débat publics guyanais et hexagonal, ainsi qu’à favoriser la libération de la parole des anciens pensionnaires, femmes et hommes, qui, pour la plupart, taisaient jusque-là leur vécu.

Dans ce contexte, le Collectif pour la mémoire des homes indiens, qui réunit notamment d’anciens pensionnaires, a été fondé à Cayenne, en février 2023. L’un de ses objets est « la mise en place d’une commission vérité et réconciliation pour aller vers une résilience individuelle et collective ». Pour répondre à la sollicitation de divers acteurs autochtones (dont le grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenges de Guyane), l’IFJD-Institut Louis-Joinet (une organisation indépendante et reconnue pour son expertise en matière de justice transitionnelle) a conduit une investigation sur cette question. Un temps perturbée par le retrait, encore inexpliqué, du grand conseil coutumier, cette investigation a pu être enfin conduite à son terme et vient de conclure à la nécessité de mettre en place une commission vérité, comme l’ont fait, dans des circonstances comparables, d’autres démocraties dans le monde.

Soustraits à leurs familles

Les homes indiens s’inscrivent dans une histoire coloniale et ont été le lieu de diverses pratiques coercitives, dont l’objet était de remodeler l’environnement culturel et religieux des élèves par une prohibition de tous les usages et règles de vie autochtones, ainsi que de la pratique de leur langue et de leur religion pour imposer une identité française et catholique. Cette pression était encore accentuée par la situation d’infériorité des populations autochtones, qualifiées par le droit positif de l’époque de « populations primitives ». L’intervention régulière des gendarmes contraignait les parents à placer leurs enfants dans ces pensionnats, au sein desquels certains considéraient qu’ils « devaient être traités comme des orphelins » pour les soustraire à l’influence de leur famille et de leur communauté.

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