dimanche, mai 5
Des surveillants pénitentiaires surveillent l’entrée de la maison d’arrêt de Bordeaux-Gradignan, à Gradignan (Gironde), le 11 décembre 2023.

C’était l’une des mesures phares du président Nicolas Sarkozy en 2007. Les peines planchers à l’encontre des condamnés en récidive n’ont eu qu’un « faible effet dissuasif », contrairement à leur but affiché à l’époque, rapporte une étude de l’Institut des politiques publiques, publiée mardi 19 mars.

Cette loi, fortement décriée et finalement annulée en 2014 sous la présidence de François Hollande, s’est traduite par des peines en moyenne quasiment deux fois plus sévères pour les auteurs de délit en situation de récidive, c’est-à-dire ayant commis une deuxième fois le même délit. Les auteurs de l’étude, les économistes Arnaud Philippe de l’université de Bristol et Aurélie Ouss du département de criminologie de l’Université de Pennsylvanie, ont analysé la trajectoire judiciaire de 64 000 récidivistes dans les quatre à six années suivant leur sortie de prison.

Selon les chercheurs, la menace des « peines planchers » n’a pas eu l’effet escompté : empêcher ceux qui avaient commis un premier délit d’en commettre un deuxièmes. Seuls ceux qui en avaient déjà commis deux et qui ont été sévèrement punis pour le deuxième du fait de la nouvelle loi, ont vu leur probabilité de commettre un troisième délit baisser de l’ordre de 12 %. Or les « deuxièmes ou troisièmes récidives » ne représentaient environ que 1,75 % des condamnations avant la réforme, ce qui explique « l’effet dissuasif d’assez faible ampleur » de cette loi, notent les auteurs.

Hausse de la population carcérale

L’effet limité de la mesure tient aussi au fait que ces peines ne s’appliquaient qu’en cas de délit similaire, comme un vol suivi d’un vol, et pas en cas de délit différent. « Il y a eu un apprentissage de la réforme : les personnes concernées ont diminué leur probabilité de recommencer le même délit, pas d’en commettre un autre », a détaillé, mardi, M. Philippe auprès de l’Agence France Presse.

Les économistes estiment donc que la loi sur les peines planchers a eu un faible impact sur les chiffres de la délinquance. Un effet d’autant plus modeste face aux coûts engendrés par l’augmentation de la population carcérale qu’elle a provoquée. Selon les auteurs de l’étude, qui reprennent les chiffres du ministère de la justice et du rapport sénatorial sur le projet de loi finance 2015, la loi a entraîné une hausse de personnes incarcérées de l’ordre de 4 000, pour un coût annuel d’au moins 146 millions d’euros.

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Le Monde avec AFP

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