vendredi, mai 3
Didier Bénureau sur scène dans son spectacle « Entier », au Studio des Champs-Elysées, en janvier 2024.

Quel plaisir de retrouver l’humour vachard et irrévérencieux de Didier Bénureau ! Les années passent – le comédien a 67 ans – mais la bêtise humaine, que cet humoriste sait si bien incarner à travers des personnages d’affreux, de cyniques ou de méchants, n’a pas d’âge. D’autant que Didier Bénureau remonte seul en scène avec la même énergie, la même précision gestuelle qui le fait tout entier entrer dans le physique et le mental de ces imbéciles qui s’ignorent. Il a d’ailleurs appelé son nouveau one-man-show Entier, parce que c’est tout Bénureau auquel le public a droit : celui des sketches anciens devenus cultes et celui des nouveautés dans la même veine sarcastique et la même qualité d’écriture, à la fois mordante et précise.

Vêtu élégamment d’un pantalon de costume et d’une chemise bleus, l’humoriste au physique passe-partout occupe sans temps mort la scène du Studio des Champs-Elysées, à Paris. Il se fait aussi bien président démagogique de la République intervenant dans une allocution télévisée pour appeler à « cesser le chahut » et défendre le système (« plus les riches sont riches, plus les miettes sont grosses »), qu’enfant anti-écolo qui juge que la nature « bordélise la terre » et que l’homme l’a « drôlement bien rangée ». « Quand on aura fini de ranger, on ira dans l’univers, ranger ailleurs. Mais c’est peut-être parce qu’on a trop bien rangé qu’il n’y a plus rien sur Mars », s’interroge le sale gosse.

Chansons parodiques et poétiques

Parmi les imbéciles ou les fous furieux qui se succèdent, citons cet instructeur de CRS bas du front qui enjoint à ses élèves de « garder la tête froide et la matraque chaude », et les rassure sur les conséquences d’éventuels dérapages : « On ne sera pas puni, vu qu’on s’attaque à des pauvres comme nous. » Ou encore ce redoutable retraité radin, égoïste et raciste, qui se fait livrer à domicile « par l’Arabe du coin ».

Et puis ce rap anti-porno bien senti : « Déconnecte du Net, tu t’avilis, baise ta femme, arrête le virtuel. Sors de ta léthargie ton cadeau de Noël est déjà dans ton lit. » Didier Bénureau aime agrémenter ses one-man-shows de chansons parodiques ou plus poétiques. Comme celle sur le premier baiser, dans laquelle, avec un petit côté Bourvil dans La Tendresse, il donne un mode d’emploi pour un baiser non imposé.

Quant à ses anciens personnages, on ne se lasse pas de les retrouver et on envie les jeunes générations qui les découvriront : la belle-mère odieuse et indigne totalement désinhibée, le travesti collabo qui ne comprend pas pourquoi il en a « bavé » à la Libération, Jean-Marc le « phénomène sexuel… malheureusement prêtre », et bien sûr l’inénarrable hommage parodique au soldat Moralès : « Toi qui voulais voyager, te voilà éparpillé. » On a beau les connaître, ils restent tous d’une drôlerie irrésistible et indémodable.

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