vendredi, mai 17
« Puccini au piano » (1898), de Leonetto Cappiello. Publié dans « Le Rire », n° 191, le 2 juillet 1898. Mine de plomb, pastel et fusain sur papier, 53,3 cm x 40 cm.

Bouillon Kub, chocolat Klaus, parapluies Revel ou anisette Marie Brizard : durant la Belle Epoque, de nombreux produits de consommation s’affichent sur des compositions publicitaires épurées et colorées signées Leonetto Cappiello (1875-1942). Avant d’être affichiste, l’artiste italien était caricaturiste de presse. Une exposition au Musée d’art et d’histoire Louis-Senlecq, à l’Isle-Adam (Val-d’Oise), où Cappiello passait ses vacances, présente cette part de son travail artistique à travers une centaine de dessins originaux. Publiés dans divers quotidiens, hebdomadaires et revues satiriques français entre 1898 et 1905, ils sont exposés dans les petites salles de l’établissement, faiblement éclairées pour des raisons de conservation. L’essentiel des œuvres provient de la famille de l’artiste. Quelques-unes ont été prêtées par le Musée d’Orsay et le Musée des arts décoratifs, à Paris.

L’une de ses premières caricatures, qui ouvre l’exposition, représente le compositeur italien Giacomo Puccini (1858-1924), l’air concentré, jouant du piano. C’est à l’occasion d’un voyage à Paris que le dessinateur rencontre l’artiste transalpin. Il lui propose de le caricaturer. Son dessin est publié le 2 juillet 1898 dans le journal satirique Le Rire. Quelques jours plus tard, il propose à Réjane (1856-1920), une comédienne populaire, de se prêter à son tour à l’exercice. La représentation flatteuse qu’il fait de l’actrice envoie un signal au monde du spectacle : Cappiello devient un caricaturiste en vue.

Parcours thématique

Son travail est ainsi, entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, plébiscité par les gens de scène. Une salle est consacrée à ses nombreux portraits de Sarah Bernhardt (1844-1923), dans ses habits de scène. Les actrices de théâtre réclament leur caricature, moins par goût de la dérision que par plaisir d’être croquées de manière valorisante. Peut-on d’ailleurs les qualifier de caricatures quand on sait que ces dessins étaient souvent avalisés par leurs sujets, et que Cappiello prenait soin de demander leur autorisation avant de les dessiner ?

Le parcours de l’exposition est conçu de façon thématique pour donner à voir les différents cénacles que l’artiste a côtoyés et dessinés. Cappiello est un caricaturiste mondain. Il représente les gens de scène en vogue et cultive des affinités avec la fine fleur du spectacle de l’époque. Acteurs de vaudeville, musiciens, hommes de lettres : tout le monde passe sous son pinceau.

Les décors ont peu d’importance. Cappiello se concentre sur les expressions du visage, les attitudes et les postures. D’un trait effilé et précis, il griffonne l’idée qu’il se fait de son sujet. Le regard de l’actrice Marthe Mellot (1870-1947) est, par exemple, condensé en un point. L’artiste invente parfois des situations pour mettre en scène le Tout-Paris, comme dans ce portrait d’Edmond Rostand (1868-1918) où l’on voit l’écrivain, moustache altière, tenue droite, habit vert brodé de branches d’olivier, se regarder dans le miroir le jour de son intronisation à l’Académie française. Cappiello construit sa notoriété en miroir de celle des autres.

Il vous reste 14.59% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version