Exposition historique : une suite d’œuvres de Jean Degottex (1918-1988) et les poèmes que Bernard Heidsieck (1928-2014) composa pour elles. Degottex fut l’un des expérimentateurs les plus radicaux de l’abstraction : des surfaces écarlates ou noires qui semblent monochromes, mais sont animées de nuances, et sur lesquelles se posent des tracés noirs en boucles ou des coulures. En 1958, il les expose à la galerie Kléber, à Paris, où Heidsieck en subit le choc. Lui-même cherche alors comment parvenir à la forme la plus immédiate de la poésie et compose onze pièces sonores à propos des Degottex. Leur rencontre devient amicale et suscite plusieurs moments de travail en commun dans les deux décennies suivantes. L’exposition en recompose les phases, réunissant à nouveau les encres et acryliques de l’un, et les textes, partitions et enregistrements de l’autre. Les Degottex les plus épurées et sombres font évidemment penser aux Black Paintings de Mark Rothko, exactement contemporaines. En dehors de mauvaises raisons – nationalisme du marché nord-américain, paresse et conformisme des musées –, on ne voit pas pourquoi les Rothko sont devenus immensément célèbres alors que les Degottex, qui ne sont pas moins intenses, en sont encore aujourd’hui au stade de la réapparition.
« Jean Degottex/Bernard Heidsieck. Poèmes-partitions D. ». Galerie Kamel Mennour, 6, rue du Pont-de-Lodi, Paris 6e. Jusqu’au 1er juin. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures.
