dimanche, avril 28

Une « opération électorale spéciale » a lieu en Russie du 15 au 17 mars. Le président sortant, Vladimir Poutine, est en effet le candidat principal à sa propre succession. Dans un système sans alternative politique, il obtiendra certainement un score triomphal, qui dépassera son résultat de 2018 (77 % des suffrages). Grâce à la réforme constitutionnelle conduite en 2020, il lui sera possible de briguer deux autres mandats présidentiels, jusqu’à 2036.

Deux ans après le début de l’invasion de l’Ukraine, Vladimir Poutine se montre très confiant : l’armée russe peut se targuer de la prise de la bourgade ukrainienne d’Avdiïvka, l’économie affiche une croissance de 3,6 % en dépit des sanctions occidentales, aucun des membres de l’élite n’a déserté, l’opposition est décapitée et la société reste insensible aux pertes humaines élevées au front.

Le scénario de cette « élection » est pourtant le plus verrouillé de toutes les procédures électorales que la Russie a connues depuis l’arrivée de Poutine au pouvoir. Les techniques de manipulation sont rodées et de nouvelles viennent enrichir cet arsenal, comme le vote électronique dans environ un tiers des régions russes. Comme à son habitude, le président sortant ne daigne pas participer aux débats avec les trois autres candidats fantoches. Peu connus du public russe, ces derniers sont issus des partis parlementaires alignés sur la politique du Kremlin. Signe de loyauté, ils n’iront pas faire campagne dans les « nouveaux territoires », ces régions ukrainiennes annexées, où les images mettent en scène des personnes âgées à côté d’hommes armés et cagoulés qui accompagnent les urnes mobiles pour le vote anticipé. L’Union européenne a déjà fait savoir que le vote dans ces territoires, dont l’intégralité n’est même pas contrôlée par Moscou, ne sera pas reconnu.

Failles et déboires

La mascarade électorale peine à intéresser les Russes à cause de l’absence de toute intrigue. Le rapport récent de l’association de surveillance électorale Golos, officiellement dissoute, décrit une campagne particulièrement terne. Néanmoins, le Kremlin y tient. A la différence de l’Ukraine, où – conséquence de la loi martiale – l’élection présidentielle a été reportée sine die, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, avait fait savoir plusieurs mois avant la tenue de l’élection qu’elle aurait bien lieu à la date prévue et dans le respect de toutes les procédures formelles prévues par la loi russe.

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Il ne faut pas s’en étonner. Un régime politique autoritaire « personnaliste » a besoin d’une reconfirmation régulière de la légitimité et de la popularité de son leader. Poutine tout-puissant cherche l’acclamation de la population et de ses élites. D’autant que son système a affiché diverses failles depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, tant par la piètre qualité de l’information fournie par les différents services spéciaux au président, convaincus de la possibilité de prendre Kiyv [le nom ukrainien de Kiev] en trois jours, que par les déboires de l’armée russe.

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