mardi, mai 7

Enzo Poultreniez les appelle les « étoiles filantes ». Ce sont, comme lui, des collaborateurs du mouvement Les Ecologistes. Ils sont arrivés à l’occasion d’une campagne électorale dans laquelle ils se sont investis sans retenue, jusqu’à l’épuisement. « On ne les reverra plus », conclut-il.

Aujourd’hui à la tête de l’Association des collaborateurs d’élus écologistes et apparentés (Aceva), il se dit inquiet pour la santé de ces salariés éphémères mais aussi, plus largement, pour celle de l’ensemble des collaborateurs du mouvement, dont beaucoup seraient touchés par un « surengagement ».

Lui-même est allé au bout de ses limites. En 2015, il a été l’un de ces « martyrs » prêts à « se sacrifier pour la cause ». Victime d’un burn-out, il explique aujourd’hui avoir pris du recul et appris à dire non.

Rien d’une exception

Le ressenti de M. Poultreniez est confirmé par une enquête menée par le sociologue Simon Cottin-Marx en 2023 sur les conditions de travail des collaborateurs d’Europe Ecologie-Les Verts (rebaptisé Les Ecologistes), à la demande de l’Aceva, et dont Le Monde livre les résultats en exclusivité. Elle montre que, si les salariés trouvent du sens au travail ils se plaignent d’exercer un métier qui « déborde ».

68 % se disent sollicités en dehors des heures de travail, ce qui a une influence négative sur leur vie privée (47 %) et leur santé (46 %) ; 64 % disent être préoccupés par la situation de collègues, et 66 % déclarent connaître des collègues ayant quitté leur emploi pour cause de souffrance ou d’épuisement au travail.

La situation rencontrée chez Les Ecologistes n’a rien d’une exception. Elle peut être observée dans d’autres mouvements politiques, des syndicats, des associations. Les structures militantes peuvent être ainsi, parfois, le cadre de situations de travail douloureuses et représenter un risque pour la santé de leurs salariés.

Le fort engagement des salariés dans leur travail est une première explication. Les collaborateurs sont en grande majorité des militants qui épousent une cause. « Au départ, il y a la flamme », résume le sociologue Matthieu Hély. Leur implication est d’autant plus forte que la frontière est floue entre missions salariées et militantisme (surtout lorsque l’on côtoie des bénévoles eux aussi très investis), et que le dévouement est présenté comme une norme. « Il est par exemple très dur de dire non lorsque des actions sont proposées par mon employeur – et, donc, pour la cause – le soir ou le week-end », reconnaît une salariée dans l’humanitaire.

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