jeudi, mai 9
Des douaniers contrôlent des véhicules au péage de Beynost, près de Lyon, lors de l’« opération Colbert », le 1er juin 2023.

Le camion, chargé de salades, louvoyait non loin de la frontière espagnole jusqu’à ce qu’il soit stoppé pour un contrôle inopiné. Les fouilles des douaniers corroborent cette scène banale de commerce maraîcher jusqu’à ce qu’ils découvrent qu’à la cinquième rangée de palettes le chargement frisé change de nature. C’est du tabac de contrebande – 9 tonnes au total – qui remplit le fond du véhicule. Cette saisie est l’une des plus grosses prises au terme de l’opération « Colbert II » visant le trafic de tabac, sur l’ensemble du territoire français.

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Les résultats, qualifiés d’« historiques » par l’administration, se chiffrent au total à 27 tonnes de marchandise illicite récupérées entre le mercredi 20 et le mercredi 27 mars. Ils mettent aussi au jour les méthodes de groupes criminels opportunistes, capables de trafiquer du tabac autant que des stupéfiants, parfois en suivant les mêmes routes, ou usant des mêmes techniques, à la manière des cartels colombiens – réputés pour leur ingéniosité en matière de dissimulation de cocaïne au sein de cargaisons de fruits et légumes.

L’opération « Colbert II » a aussi permis de réaliser 108 interpellations et 52 demandes de fermetures administratives de commerces. Elle fut réalisée à bas bruit, quand « place nette », ciblant les drogues, saturait l’espace médiatique. Sa mise en œuvre aurait pu être plus « extra-large » si certaines opérations n’avaient pas été annulées ou redimensionnées en raison de la réquisition de personnel – notamment de forces de l’ordre – pour « place nette », témoignent plusieurs douaniers et policiers.

Phénomène de « mules »

« On applique au tabac les mêmes méthodes que pour la lutte contre le trafic de stupéfiants », indique au Monde Thomas Cazenave, ministre des comptes publics, qui liste trois enjeux majeurs : « La présence, derrière ces trafics, du crime organisé ; les plusieurs milliards de pertes annuelles de recettes publiques ; et la défense des 23 000 buralistes qui subissent cette concurrence déloyale. »

Les affaires les plus récentes démontrent que « les organisations criminelles présentes en France, dont désormais des groupes sud-américains, utilisent le tabac comme une forme de diversification de leurs revenus », souligne Corinne Cléostrate, sous-directrice à la lutte contre la fraude à la direction générale des Douanes. Un « trafic de fourmis », segmenté en petites quantités au niveau des détaillants, nourri par des logiques d’approvisionnement parfois industrielles (convois par semi-remorques, utilisation de grands entrepôts…).

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