jeudi, mai 9

Un proche âgé n’a plus toute sa tête ? Ne peut plus gérer ses dépenses ni formuler sa pensée ? Lorsqu’une personne majeure perd ses facultés mentales, ou qu’une raison médicale l’empêche d’exprimer sa volonté, une mesure de protection juridique peut être prise afin de protéger ses intérêts. Cette protection, garantie par l’article 415 du code civil, peut prendre différentes formes, détaillées sur un site gouvernemental dédié aux personnes âgées et à leurs proches.

En France, la perte d’autonomie concernait près d’1,3 million de personnes en 2021, et touche particulièrement les personnes âgées (près d’une personne sur trois de plus de 85 ans) selon l’INSEE. Pour protéger ces personnes vulnérables, un membre de la famille ou un proche peut solliciter un juge des contentieux de la protection, qui établira, sur la base d’une expertise médicale, un régime de protection adapté à l’altération de l’état de santé de la personne.

De la tutelle, mesure la plus contraignante, jusqu’aux simples mesures d’accompagnement, le point sur les différentes mesures de protection juridique dont peuvent bénéficier les personnes majeures.

Tutelle

La tutelle est la mesure de protection la plus contraignante. Elle concerne des personnes qui « ne peuvent plus veiller sur leurs intérêts du fait de l’altération de leurs facultés mentales » ou qui « sont physiquement incapables d’exprimer leur volonté ». Lorsqu’une demande de mise sous tutelle est déposée, la personne doit être auditionnée, si son état le permet, par le juge des contentieux de la protection.

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Celui-ci nomme ensuite un ou plusieurs tuteurs − un proche, si possible, ou un mandataire professionnel − pour représenter la personne dans tous les actes de la vie civile. La personne protégée perd toute capacité juridique à gérer ses revenus et son patrimoine. Le tuteur doit rendre compte des décisions qu’il prend à la personne protégée mais aussi au juge. Depuis 2019, les personnes sous tutelle ne peuvent plus être privées de leur droit de vote.

Curatelle

Sous curatelle, la personne protégée peut gérer seule ses affaires courantes, mais un curateur assiste et contrôle les décisions importantes qu’elle prend, comme la vente d’un bien immobilier, l’ouverture d’un compte en banque ou un projet de donation. Il existe plusieurs types de curatelle – simple, renforcée ou aménagée – qui peuvent élargir ou restreindre les actes que la personne protégée peut entreprendre sans l’accord de son curateur.

Fin 2022, 713 500 personnes majeures étaient soit sous curatelle soit sous tutelle, selon le ministère de la justice.

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Sauvegarde de justice

La sauvegarde de justice est une mesure de protection temporaire. Sous ce régime, la personne conserve l’exercice de ses droits, mais un mandataire spécial peut être nommé pour réaliser à sa place certains actes d’administration : déblocage de son assurance-vie, vente d’un bien immobilier, etc. Elle peut aussi être décidée dans l’attente d’un placement sous curatelle ou sous tutelle. Une sauvegarde de justice ne peut pas durer plus d’un an, et peut être renouvelée une fois.

C’est le régime sous lequel a été placé l’acteur Alain Delon, pris dans les affres d’une brouille familiale opposant ses enfants, en janvier 2024. Il est désormais assisté d’un mandataire judiciaire « pour son suivi médical et quant au choix des praticiens assurant son suivi ».

Habilitation familiale

L’habilitation familiale a rejoint la liste de ces régimes de protection en 2016. Elle permet à un ou plusieurs proches (conjoint, partenaire pacsé, concubin, enfant, petit-enfant, parent, grand-parent, frère ou sœur) d’une personne dont les facultés sont altérées de la représenter et de prendre des décisions en son nom. L’habilitation peut être générale ou limitée à certains actes.

A la différence de la sauvegarde de justice, de la curatelle ou de la tutelle, une fois l’habilitation prononcée, le juge n’intervient plus, ce qui peut rendre ce dispositif plus facile à accepter psychologiquement et à organiser pour les familles. Mais il implique aussi une grande confiance en la personne désignée.

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Mandat de protection future

Le mandat de protection future permet à une personne de déterminer à l’avance les dispositions qu’elle souhaite voir prendre dans le cas où elle ne serait plus en état (physique ou mental) de le faire. Il permet de choisir la ou les personnes qui vont exercer sa protection, et de définir l’étendue de cette dernière.

Le mandat de protection future permet de protéger la personne, ses biens, ou les deux. Il ne fait pas perdre, sur le moment, ses droits ni sa capacité juridique à la personne qui le demande et s’active après une expertise menée par un médecin qui devra constater que les capacités physiques ou mentales de la personne sont altérées. Il s’agit donc avant tout d’un contrat, et non d’un mandat de protection judiciaire, dont l’objectif est de pouvoir respecter la volonté de la personne dans la protection de ses intérêts.

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Alors que sa santé a largement décliné depuis un accident cardiaque en avril 2023, Jean-Marie Le Pen, l’ancien président du Front national – rebaptisé Rassemblement national –, a ainsi été placé en février 2024 sous un tel mandat. Il fait de ses trois filles – Marie-Caroline, Yann et Marine – ses mandataires.

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Mesures d’accompagnement

Pour les personnes qui ont de grandes difficultés dans la gestion de leurs ressources au quotidien, mais n’ont pas de difficultés psychologiques ou psychiatriques, il existe aussi des mesures d’accompagnement graduées.

Une mesure d’accompagnement social personnalisé peut être mise en œuvre par les services sociaux du département, en accord avec la personne, si celle-ci ne parvient pas à utiliser correctement les prestations sociales qu’elle touche (par exemple, le RSA). Si ce type de mesure n’est pas suffisant pour la rendre autonome, un juge peut aussi imposer une mesure d’accompagnement judiciaire, et désigner alors un mandataire qui perçoit et gère tout ou une partie des prestations de la personne désignée.

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