dimanche, mai 5
Megan Draper (Jessica Paré) dans la série « Mad Men », créée par Matthew Weiner.

CHRONIQUE

Moins 14 % : le nombre de séries produites aux Etats-Unis est tombé de 600 à 514 entre 2023 et 2024. Faute d’organisme professionnel ou étatique, la responsabilité de ce recensement annuel incombe, depuis qu’il s’en est emparé en 2002, au PDG de la chaîne payante FX, John Landgraf. Celui-ci a, comme d’habitude, communiqué le résultat de ses calculs lors de la rencontre annuelle des professionnels avec la Television Critics Association.

Lire la chronique Pause séries (en 2022) : Article réservé à nos abonnés La fin de l’âge de la « Peak TV »

C’est la plus importante chute enregistrée depuis le premier recensement, en 2002. Cette année-là, on ne comptait que 182 séries. Depuis, la croissance a été continue – à l’exception de la chute enregistrée en 2020, après l’interruption des tournages pendant la pandémie de Covid-19. Cette fois, John Landgraf en est sûr (il l’avait déjà annoncé par le passé), on a franchi le pic, ce fameux « pic » qui a donné naissance à l’expression « Peak TV ». Cette phase avait succédé à l’âge d’or qualitatif du début du XXIe siècle, né de la politique audacieuse de la chaîne payante HBO, suivie d’abord par ses concurrentes directes puis par les plates-formes, Netflix en tête.

La « Peak TV », c’était autre chose : une avalanche de séries nouvelles, aux saisons brèves (d’une douzaine d’épisodes pour Les Soprano ou Mad Men, on est passé à six ou à huit), souvent éphémères. La masse d’histoires proposées garantissait qu’on y trouverait – quelles que soient les attentes – de quoi se satisfaire, que l’on aspire à la sophistication ou à la lobotomie temporaire, à Severance ou à Reacher.

Nul ne sait, même pas John Landgraf, à quel palier s’arrêtera cette décroissance (due en partie seulement aux grèves des scénaristes et des acteurs hollywoodiens). Mais il ne faut pas espérer qu’elle favorisera la survie des projets les plus exigeants.

Loi des algorithmes

Un temps, le succès des plates-formes de streaming (puisque c’est cette forme de visionnage qui l’a emporté sur les autres) se mesurait au nombre d’abonnés. Mais les abonnés coûtent cher, comme l’a fait remarquer avec insistance Wall Street aux multinationales de la fiction. Celles-ci ont résolu de limiter les coûts, en annulant massivement les séries, qu’elles soient trop onéreuses ou qu’elles n’aient pas trouvé leur public, et à trouver d’autres ressources, dans la publicité essentiellement (on observera avec intérêt le sort de la plainte collective d’abonnés américains de Prime Video qui se sont vu imposer l’arrivée de spots dans leurs séries en cours d’abonnement).

Lire la chronique Pause séries (en 2022) : Article réservé à nos abonnés 200 000 abonnés vous manquent et tout est dépeuplé

Les formules qui ont fait leurs preuves, les remakes, les productions bon marché ont de beaux jours devant elles, pendant que les projets risqués – par leur sujet ou leur forme – sont de plus en plus vulnérables. La brièveté des saisons ne leur laisse que très peu de temps pour s’imposer, le nombre – toujours impressionnant, malgré la décroissance entamée – de nouvelles productions rend leur identification difficile, dans un système qui préfère la loi des algorithmes à celles des critiques, des trophées ou des avis des spectateurs.

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