mardi, mai 7
Dispositif mis en place à l’accueil d’un commissariat de police pour permettre aux victimes potentielles de préciser leurs griefs, à Bordeaux, le 8 février 2024.

De nouveaux chiffres s’invitent dans le débat actuel sur la pertinence ou non d’introduire la notion de consentement dans la définition du viol. Selon une note inédite de l’Institut des politiques publiques, dévoilée mercredi 3 avril, le taux de classement sans suite s’élève en effet à 86 % dans les affaires de violences sexuelles, atteignant même 94 % pour les viols. En cause, majoritairement : des infractions « insuffisamment caractérisées ».

L’autrice, Maëlle Stricot, doctorante à l’Ecole d’économie de Paris et affiliée à l’Institut des politiques publiques, a décortiqué un million d’affaires de violences sexuelles et de violences conjugales traitées par les parquets entre 2012 et 2021 – une décennie marquée par un afflux sans précédent de ce type de dossiers après 2017, dans le sillage de #metoo. Un tiers du corpus concerne des faits de violences sexuelles (viols, agressions sexuelles, harcèlement sexuel) et deux tiers des violences conjugales.

Prenant des formes diverses (violences physiques, psychologiques, emprise…), ces dernières s’inscrivent en général dans des logiques de domination au sein du couple. La chercheuse s’est intéressée à leur traitement judiciaire, depuis le dépôt de plainte ou le procès-verbal, jusqu’au classement sans suite ou le passage au tribunal correctionnel ou en juridiction pour mineurs. Les viols – peu nombreux – jugés aux assises ou ayant fait l’objet d’un non-lieu ne sont pas étudiés.

« Infraction insuffisamment caractérisée »

Des traits communs apparaissent dans tous ces dossiers. Leur dimension genrée, déjà largement documentée, est une nouvelle fois incontestable : « En moyenne, 83 % de l’ensemble des victimes de violences sexuelles dont le sexe est connu sont des femmes, et ce chiffre s’élève à 91 % pour les violences conjugales. » A l’inverse, sur les 970 000 personnes mises en cause sur la période, « la grande majorité sont des hommes (94 % pour les violences sexuelles et 88 % pour les violences conjugales) ».

Quand les auteurs sont poursuivis, ils sont souvent condamnés, relève par ailleurs la note. Mais la publication s’attache surtout à mettre en lumière le nombre important de classements sans suite que rencontrent ces situations, un aspect régulièrement dénoncé par les victimes et leurs soutiens. Et ce, à juste titre : leur taux est élevé non seulement pour les violences sexuelles, mais aussi pour les violences conjugales, atteignant 72 % en moyenne pour ces dernières sur l’ensemble de la période considérée par l’Institut.

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