mercredi, mai 8

Chaque année, en France, près d’un litre d’eau potable sur cinq disparaît dans les réseaux de distribution. Selon les chiffres collectés et publiés par Sispea (observatoire des services d’eau et d’assainissement), cela représentait, en 2022, au moins 480 millions de mètres cubes d’eau potable, un volume colossal.

Et encore, ces chiffres sont loin d’être exhaustifs, en raison, notamment, des modalités de déclaration (les collectivités de moins de 3 500 habitants n’ont pas l’obligation de transmettre leurs données) et de données manquantes pour certaines grandes collectivités. Mais ils permettent, a minima, de caractériser ces fuites. Les plus importantes pertes, en volume, sont localisées au niveau de zones urbaines : les vingt plus grandes villes pour lesquelles nous disposons de données recouvrent presque le quart du volume des fuites répertoriées.

La palme des plus fortes déperditions d’eau revient à la métropole de Nice-Côte d’Azur, qui laisse s’échapper chaque année près de 19 millions de mètres cubes d’eau de son réseau (25 %). Elle est suivie par la Ville de Paris (16 millions de mètres cubes) et métropoles de Bordeaux (13,2 millions de mètres cubes), Montpellier (8,8 millions de mètres cubes), Nîmes (6,2 millions de mètres cubes), Rouen (5,4 millions de mètres cubes) et Grenoble (4,8 millions de mètres cubes).

Toutefois, en rapportant ce volume total d’eau perdue à la population desservie, une autre image se dessine. Alors que la moyenne se situe à 23,5 mètres cubes d’eau gaspillée par habitant et par an selon les données publiées, on observe de fortes disparités, entre 0 mètre cube pour une cinquantaine de collectivités et 1 144 mètres cubes pour Lescun, dans les Pyrénées-Atlantiques. La carte ci-dessus le montre : les plus forts volumes gaspillés par habitant (représentés par les couleurs les plus foncées) se retrouvent dans les communes qui supportent elles-mêmes la charge de la distribution d’eau potable, plutôt que de la partager au sein d’un regroupement de communes. Sur l’ensemble des distributeurs dont les pertes d’eau par habitant dépassent les 100 mètres cubes (l’équivalent de 500 baignoires de 200 litres), on dénombre 61 communes gestionnaires, six syndicats de l’eau et une communauté d’agglomération.

Dans une carte rendue publique le 20 mars, l’association des intercommunalités de France a pointé les régies communales, qui représentent, selon ses calculs, 151 des 198 services de distribution d’eau dont les pertes sont supérieures à 50 % de l’eau distribuée. Une communication destinée à justifier le transfert de ces services à l’échelle intercommunale : censé devenir obligatoire à partir de 2026 en vertu de la loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République, ce transfert fait l’objet de contestations, notamment du Sénat, tandis que des propos ambigus d’Emmanuel Macron en mars 2023 font craindre un recul.

C’est sur ces communes, présentées comme des « points noirs », que le gouvernement a décidé de concentrer ses efforts. Dans le cadre du « plan eau », le président Macron a annoncé en 2023 la mobilisation de 180 millions d’euros pour faire face en priorité à ces « fuites très importantes », dans « les communes qui perdent plus de 50 % de l’eau ».

Mais le problème des pertes d’eau dépasse largement le périmètre restreint des petites communes isolées. Même si elles sont loin d’être négligeables, les fuites de ces 198 distributeurs ne représentent que 6,7 % du volume total perdu au cours de l’année – légèrement moins que les pertes cumulées des réseaux de distribution de Nice et Paris.

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