Qui n’a jamais rêvé un jour de connaître l’avenir ? La question a hanté les artistes à travers les siècles, d’Albrecht Dürer (1471-1528) à Marc Chagall (1887-1985), en passant par Gustave Doré (1832-1883) ou Auguste Rodin (1840-1917), comme le montre l’exposition « Prédictions, les artistes face à l’avenir », qui se tient actuellement à Bourg-en-Bresse (Ain).
« L’humanité a toujours été obsédée par la prédiction. Prévoir, c’est aussi pouvoir agir et gouverner. Il y a une dimension autant politique que religieuse dans l’art de lire l’avenir », souligne Magali Briat-Philippe, responsable du service des patrimoines du monastère royal de Brou.
L’exposition se déploie en deux parties, avec un premier parcours « classique », qui rassemble au monastère royal de Brou les œuvres les plus prestigieuses – il sera de nouveau proposé au Musée Thomas-Henry, à Cherbourg-en-Cotentin (Manche), du 12 juillet au 16 octobre –, présentant des œuvres allant de la Renaissance au XXe siècle, suivi d’un volet contemporain, au sein de l’H2M - Espace d’art contemporain de Bourg-en-Bresse.
L’obsession de la fin des temps
Ainsi, à Brou, chef-d’œuvre de style gothique brabançon du début du XVIᵉ siècle, le premier volet de l’exposition « démarre en quelque sorte par la fin, avec une première partie consacrée à la fin des temps, explique Magali Briat-Philippe. Toutes les civilisations s’intéressent à ce qui va advenir de l’humanité. Mais la religion qui s’en est le plus préoccupée reste peut-être le christianisme ».
Du dragon à multiples têtes gravé sur la première Bible imprimée en allemand (en 1483) par Antoine Koberger aux terrifiantes scènes du Jugement dernier peintes par le Japonais Tsuguharu Foujita (1886-1968) en passant par L’Avarice et la Luxure, d’Auguste Rodin : les œuvres présentées sont effectivement truffées de références bibliques, notamment l’Apocalypse.
Le parcours organisé à Brou se déploie ensuite en trois grands ensembles : un premier consacré aux œuvres présentant des messagers divins, de Cassandre aux prophètes bibliques, en passant par les oracles antiques ; un deuxième sur les arts divinatoires, des astrologues aux cartomanciennes, en passant par les « diseuses de bonne aventure » ; un dernier, enfin, dédié à la littérature et aux légendes européennes avec, clou du spectacle, l’hypnotique Prophétesse Libuse, portrait de la fondatrice mythique de Prague par Karel Masek (1865-1927).
On pourra regretter le caractère européocentré de l’exposition, qui ne mentionne pas les traditions d’Orient ou d’Extrême-Orient ou des autochtones amérindiens. Il faut aussi prévenir le futur visiteur, qui pourrait en être déçu : contrairement à ce que le titre de l’exposition pourrait laisser entendre, ce parcours expose principalement des œuvres d’artistes ayant représenté la divination, et non d’artistes eux-mêmes considérés comme des devins, ni des objets d’art divinatoire : ne pas s’attendre, donc, à voir des osselets ou des boules de cristal ailleurs que sur des tableaux ou des gravures.
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