Si l’on veut comprendre l’origine de l’actuel dynamisme économique américain et, en miroir, le décrochage européen, pas besoin d’aller très loin. Il suffit de lire les derniers résultats de ses champions de l’Internet. Microsoft, par exemple, a annoncé, mercredi 30 octobre, pour les seuls mois de juillet, d’août et de septembre, un chiffre d’affaires de 65,6 milliards de dollars (60 milliards d’euros), en croissance de 16 %. Cela signifie que l’inventeur de Windows affichera, sur une année entière, un revenu qui devrait dépasser celui de TotalEnergies, la première entreprise française.
Meta, de son côté, a présenté, sur la même période, un chiffre d’affaires de 40,6 milliards de dollars, en hausse de 19 %. A ce train-là, l’entreprise créée en 2004 devrait faire mieux sur l’année que la centenaire allemande Mercedes ou le français EDF. Tandis que Google, avec presque 90 milliards de dollars de ventes sur ces mêmes trois mois, en hausse de 15 %, surpasse le premier industriel européen, Volkswagen.
Enfin, si l’on s’attarde sur les profits, la comparaison est encore plus cruelle. Google gagne désormais 26 milliards de dollars par trimestre, Microsoft, 25 milliards, et Meta, 15 milliards. Au total, Google, Microsoft et Apple figurent toutes les trois dans les cinq entreprises les plus profitables du monde. La première européenne de ce classement, TotalEnergies, figure en vingt-cinquième place.
Centrale nucléaire en construction
Mais il en fallait plus pour ravir les investisseurs boursiers. Il faut dire que les niveaux de valorisation de ces entreprises, qui, à elles trois, font plus que les cinquante premières entreprises de la zone euro, n’autorisent pas la plus petite inquiétude. Et celle-ci a pointé son nez quand Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, a évoqué une accélération des investissements dans l’intelligence artificielle en 2025.
Même avertissement chez Microsoft, dont les seules dépenses de sa division cloud ont doublé sur le trimestre, à 20 milliards de dollars. La firme arrose tous azimuts, même dans une centrale nucléaire en construction. Cette valse de centaines de milliards de dollars donne le tournis à Wall Street, qui a fait paradoxalement baisser les cours de Microsoft et de Meta à l’annonce de leurs très bons résultats. Dépenser sans compter pour ne pas se faire distancer, sans dégrader la machine à profits, c’est le nouveau pari quotidien des géants américains. Pas celui de l’Europe.