L’hypothèse circulait depuis des mois, accréditée par les besoins pressants de Patrick Drahi, propriétaire et fondateur d’Altice, en argent frais, et l’envie de Rodolphe Saadé, PDG de CMA CGM, de consolider le groupe de presse qu’il est en train de constituer. Vendredi 15 mars, c’est devenu un projet concret, avec l’annonce par Altice du rachat à 100 % de sa branche média (BFM-TV, BFM Business, BFM Régions, BFM Radio, RMC, RMC Story, RMC Découverte, RMC Sport, RMC BFM Play) au groupe de fret et de logistique. L’information a été annoncée aux délégués syndicaux, à 10 h 30.
La nouvelle fait l’effet d’un coup de tonnerre dans un paysage médiatique encore groggy de l’abandon de la fusion de M6 avec TF1, en septembre 2022, puis l’échec, quelques semaines plus tard, de la vente de M6 par le groupe Bertelsmann.
C’est aussi un gros coup pour l’encore modeste Whynot Media, qui devient un acteur des médias de tout premier plan. Il s’est constitué à partir du groupe de presse quotidienne régionale La Provence (La Provence, Corse Matin), acquis fin 2022. Il rachète ensuite La Tribune, plate-forme numérique d’information économique aux implantations régionales, en mai 2023, autour de laquelle a été fondé le quotidien du septième jour La Tribune Dimanche, à l’automne 2023.
Avec BFM-TV, la filiale médias de l’armateur franco-libanais confirme son ambition de rester ancrée dans les territoires : la chaine compte onze déclinaisons régionales. Whynot Media dispose par ailleurs d’une participation d’une dizaine de pour-cent au capital de M6, et une autre dans le média video en ligne Brut.
Le temps presse
« CMA CGM a l’ambition de constituer un groupe de médias de premier plan », revendiquait Laurent Guimier, alors directeur de la filiale médias, en décembre. A l’époque, l’ancien journaliste avait été aperçu dans les locaux de la chaîne d’information, ce qui avait contribué à crédibiliser la rumeur. L’imminence d’une transaction semblait d’autant plus probable que la fenêtre d’opportunité pour une vente semblait sur le point de se refermer.
En effet, la procédure menant à l’attribution d’autorisations de diffusion de quinze chaînes de la TNT, dont BFM-TV, a déjà commencé (les dossiers doivent être déposés avant le 15 mai). Du fait que seul le propriétaire d’une chaîne puisse briguer l’obtention d’une fréquence, et qu’une cession ne s’effectue pas d’un claquement de doigts, le temps presse.
Même si l’Autorité de la concurrence doit donner son feu vert à l’opération (elle est impliqué dès que le chiffre d’affaires d’une société excède 50 millions d’euros de chiffre d’affaires), l’opération paraît plus simple que lorsque Rodolphe Saadé avait candidaté au rachat de M6, en 2022 : Whynot Media ne possède ni chaîne de télévision ni station de radio susceptible de le voir accéder à une position ultradominante sur le marché. Quant à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique Arcom, « elle ne peut bien évidemment pas bloquer une opération de ce type, note un observateur. Si elle reçoit une demande d’agrément en vue d’un changement de contrôle, elle devra l’examiner ».
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