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POLAR+ – LUNDI 20 MAI – 20 H 55 – MINISÉRIE
Les Britanniques ont beau en produire à la chaîne, il s’est passé quelque chose au royaume du polar. Quelque chose d’un renversement du regard, d’une mise à distance de l’horreur et de la jouissance qu’elle produit habituellement sur le spectateur.
La faute à #metoo, évidemment, et à une prise de conscience générale des faiseurs d’images, qui ont entériné leur responsabilité dans la monstration des violences faites aux femmes. The Long Shadow propose à ce titre, par le prisme de la fiction, d’ouvrir les yeux sur l’affaire de « l’Eventreur de Leeds », un tueur en série ayant terrifié le Royaume-Uni dans les années 1970.
Ambiance pluvieuse, cité industrielle miséreuse, plans sous-éclairés et cadrages menaçants, on est en terrain connu. A Leeds, dans le nord de l’Angleterre, la découverte en 1975 du corps de Wilma McCann, une mère de famille pauvre forcée de se prostituer, ne fait pas grand bruit. L’inspecteur chargé de l’enquête insiste pour qu’il ne soit pas fait mention de ses activités tarifées dans la presse. Malgré sa délicatesse, l’affaire se heurte vite au mépris et à l’indifférence. Personne n’a fait le rapprochement, mais, à cette date, le meurtrier de Wilma McCann est pourtant déjà connu des services de police.
Cinq ans d’investigations
La suite est d’une triste banalité. Le tueur continue de sévir, jusqu’à semer la panique dans les quartiers ouvriers de la ville. « Stay home, stay safe » (« restez chez vous, restez en sécurité »), clament des affiches placardées dans la ville, forçant les femmes à se claquemurer. Surtout que le psychopathe change parfois de ville – mais pas de mode opératoire – et qu’un corbeau vient troubler des recherches déjà compliquées par le manque de perspicacité des enquêteurs, qui font par ailleurs un usage douteux de leurs collègues féminines – sténo-dactylo au mieux, appât pour tenter de coincer l’agresseur au pire.
The Long Shadow retrace ainsi cinq ans d’investigations à l’aune des failles systémiques qui ont permis à « l’Eventreur » de sévir. Plutôt que de s’abîmer dans le glauque – on ne verra aucun cadavre, encore moins dénudé –, la série donne un visage et une histoire aux victimes. On pense évidemment à Sambre, la série de Jean-Xavier de Lestrade sur le violeur Dino Scala, même si la narration de The Long Shadow s’inscrit dans une forme plus conservatrice.
Dans tous les cas, il s’agit de placer les victimes au centre du récit, et non plus le tueur. The Long Shadow s’y emploie avec une certaine radicalité, en évacuant le personnage en quelques scènes. Rien ne sera dit de lui, au risque de faire de cet homme nommé Peter Sutcliffe, mort en prison en 2020, une incarnation désinvolte de la banalité du mal.
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