Le tribunal administratif de Toulouse a examiné, lundi, le dossier de l’A69.
Une audience lors de laquelle la rapporteure publique s’est prononcée pour une annulation des autorisations pour ce tronçon d’autoroute décrié.
La cour s’est donnée 15 jours pour statuer et suspendre ou non les travaux.
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Entre Toulouse et Castres, la future autoroute A69 divise
C’est une décision très attendue, d’un côté comme de l’autre. Le tribunal administratif de Toulouse s’est penché, lundi 25 novembre, sur le dossier brûlant de l’autoroute A69 (nouvelle fenêtre) en Occitanie. Une audience lors de laquelle, la rapporteure publique s’est prononcée pour une annulation de l’autorisation environnementale pour le chantier, ce qui entraînerait, de fait, la suspension des travaux pour ce projet entamé en 2023.
Une première « victoire » pour les associations de défense de l’environnement qui saluent le fait qu’une « magistrate indépendante converge vers les mêmes conclusions que nous ». « Notre argumentation a toujours été la même, il fallait tout simplement attendre un peu pour voir qu’on n’était pas totalement à côté de la plaque », se réjouit auprès de TF1info Hervé Hourcade, juriste chez France Nature environnement Occitanie Pyrénées.
Pour autant, si les conclusions de la rapporteure publique sont souvent suivis, rien n’augure de la décision finale du tribunal. Car en la matière, tout est laissé à l’appréciation des juges et dans ce dossier, tout est compliqué. « Le risque d’annulation est élevé, mais il est n’est pas certain du tout », tempère auprès de TF1Info Arnaud Gossement, avocat en droit de l’environnement.
Des avis contradictoires
L’audience a porté sur quatre recours contre le projet d’autoroute dont deux demandes d’annulation d’arrêtés préfectoraux autorisant les liaisons autoroutières A69 et A680 (lien entre l’actuelle autoroute A68 et la future A69) présentées par FNE (nouvelle fenêtre). Au cœur des débats notamment : l’autorisation environnementale délivrée à Atosca pour la réalisation de ces segments entre Toulouse et Castres. Et plus particulièrement le concept de « raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM) ».
Lors de l’audience, la rapporteure publique a jugé « excessif » d’invoquer une véritable situation d’enclavement « du sud du Tarn », pour justifier le chantier. L’avocat d’Atosca, le concessionnaire en charge des travaux, a dénoncé de son côté un manque de prise en compte de « la dépendance des habitants périurbains à la voiture ».
Deux points de vue opposés, qui montrent la complexité du dossier et l’incertitude qui règne autour de la décision du tribunal, prévue pour être rendue dans 15 jours. « Dans cette affaire, il ne faut pas oublier que plusieurs préfets ont pris et accordé cette autorisation environnementale », détaille Arnaud Gossement. « Le recours déposé par les associations pour demander une suspension en urgence des autorisations a été rejeté par un juge des référés. Ce dernier a estimé qu’il n’y avait pas de problème sur l’autorisation environnementale » autour de l’A69.
« Donc la formation de ce jugement va être confrontée d’une part aux conclusions de la rapporteure publique qui dit que l’autorisation environnementale est illégale et l’ordonnance du juge des référés qui, lui, a considéré l’inverse. Et ce n’est pas neutre, car si l’avis de la rapporteure est souvent suivi, celui du juge des référés l’est aussi », avance l’avocat.
Trois options sur la table
Trois options sont sur la table. La première est simple : le tribunal administratif décide d’annuler l’autorisation environnementale. « Cela entraînerait un arrêt des travaux », précise Arnaud Gossement. Mais cette « option coup de marteau » ne serait pas définitive puisqu’Atosca pourrait faire appel de la décision. La deuxième, à l’opposé, pourrait voir le tribunal estimer que l’autorisation environnementale est légale, rejeter le recours des associations et donner raison au juge des référés qui l’a validée en 2023. Cela ne signerait pas non plus la fin des procédures. Cette fois ce sont les associations de défense de l’environnement qui pourraient faire appel.
Une troisième voie pourrait être possible. Le juge pourrait valider la notion de « raison impérative d’intérêt public majeur » et estimer que seule l’autorisation environnementale est illégale, demandant ainsi à Atosca de la régulariser. Rien n’assure qu’elle le sera, mais le tribunal laisserait une porte ouverte à la société et à la poursuite des travaux. Une option que France Nature Environnement juge improbable. « Ou alors, il faudrait reprendre tout le projet depuis le début », estime Hervé Hourcade qui se dit « très confiant sur notre argumentation » dans ce dossier « qui a toujours été la même ». En cas de défaite au tribunal administratif, il l’affirme, la FNE et les autres associations pourront aller jusqu’au Conseil d’État.
L’affaire de l’A69 est donc loin d’être terminée, alors que le projet est aujourd’hui terminé à près de 65% avec plus de 300 millions d’euros dépensés sur les 450 millions prévus et une mise en service toujours prévue pour fin 2025. Si l’autorisation de chantier était annulée, un autre casse-tête pourrait débuter pour les autorités : renaturer les espaces déjà exploités sur le chantier de l’autoroute ou relancer un tout nouveau projet. Avec un coût estimé entre 500 millions et un milliard d’euros pour les finances publiques. Premier élément de réponse, dans 15 jours.