- Le second tour de l’élection présidentielle chilienne opposera ce dimanche deux candidats que tout oppose.
- Il s’agit de Jeannette Jara, la représentante d’une vaste coalition de gauche, et du leader d’extrême droite José Antonio Kast, un catholique ultraconservateur.
- José Antonio Kast est crédité d’une large avance par les sondages.
Il pourrait devenir dimanche 14 décembre le premier dirigeant d’extrême droite à accéder au pouvoir au Chili depuis la fin de la dictature d’Augusto Pinochet en 1990. Le candidat d’extrême droite à l’élection présidentielle José Antonio Kast est donné favori du scrutin et pourrait succéder au président de gauche Gabriel Boric, qui ne peut constitutionnellement pas briguer un second mandat consécutif.
Le second tour de la présidentielle chilienne opposera deux candidats que tout oppose : Jeannette Jara, la représentante d’une vaste coalition de gauche aux origines modestes et donc José Antonio Kast, un catholique ultraconservateur qui a axé sa campagne sur l’insécurité et l’immigration clandestine. Tous les sondages le donnent largement en tête face à sa rivale du Parti communiste. Jeannette Jara est arrivée en tête du premier tour en novembre dernier, mais José Antonio Kast et l’ensemble des candidats de droite ont cumulé plus de 50% des suffrages.
José Antonio Kast, 59 ans, a été député pendant 16 ans. Il a quitté l’Union démocratique indépendante (UDI) en 2016, estimant que le parti auquel il appartenait depuis des décennies avait abandonné ses principes conservateurs. En 2019, il crée le Parti républicain, une formation d’extrême droite qu’il dirige depuis cette date.
Un programme axé sur la sécurité
Ce responsable politique est le benjamin d’une fratrie de dix enfants. Son père, qui a servi dans l’armée allemande, s’est installé au Chili après la Seconde Guerre mondiale et y a fondé une entreprise de charcuterie prospère. Admirateur du défunt dictateur Augusto Pinochet (1973-1990), José Antonio Kast, avocat de profession, est opposé à l’avortement, à la pilule du lendemain, au divorce et au mariage entre personnes de même sexe. Membre du mouvement Schönstatt, un courant catholique conservateur d’origine allemande, il est marié et père de neuf enfants.
Le programme du candidat d’extrême droite, qui mène sa troisième campagne présidentielle, tient en une promesse : lutter contre la criminalité et les étrangers en situation irrégulière – quelque 337.000 migrants dans le pays, principalement des Vénézuéliens ayant fui la crise dans leur pays – qu’il tient pour responsables de la recrudescence de la délinquance. « Si cela ne se fait pas volontairement, nous irons les chercher »
pour les expulser, menace-t-il. José Antonio Kast a visité le Salvador de Nayib Bukele, l’Italie de Giorgia Meloni et la Hongrie de Viktor Orban.
Bien que le Chili reste l’un des pays les plus sûrs du continent, la violence liée au crime organisé a augmenté d’environ 40% au Chili depuis le début des années 2000, selon les statistiques officielles. Le taux d’homicides a progressé d’environ 50%, d’après les données de l’ONU. Les enlèvements ont également progressé, de 76% entre 2021 et 2024, pour atteindre 868 l’année dernière, selon le ministère public. Selon une récente enquête gouvernementale, 88% des Chiliens estiment que la criminalité a augmenté en 2024. Pourtant, les chiffres et les témoignages venus du terrain viennent nuancer ce constat alarmiste : si la criminalité a augmenté et est devenue plus violente, elle est partie d’un niveau très bas.
Un mur à la frontière avec la Bolivie
José Antonio Kast entretient un compte à rebours des jours le séparant, selon lui, de son arrivée au pouvoir le 11 mars et de l’expulsion des migrants sans papiers qu’il promet. Il veut aussi construire un mur à la frontière avec la Bolivie et envoyer 3.000 militaires aux frontières. Le candidat ultraconservateur a cependant exclu lors d’un face-à-face avec son adversaire de reproduire les descentes anti-immigration vues aux États-Unis. « Nous ne parlons pas (de raids) comme ceux de l’ICE »
, la police fédérale américaine de l’immigration, a-t-il affirmé, prônant plutôt des contrôles stricts.
« Le gouvernement
(de gauche, ndlr) a généré le chaos, le désordre et l’insécurité. Et nous, nous allons faire l’inverse : nous allons instaurer l’ordre, la sécurité et la confiance »
, a déclaré le candidat ultraconservateur. Lors d’un meeting de campagne mercredi à Puente Alto, dans la banlieue sud de Santiago, Jeannette Jara a elle aussi évoqué cette question de la sécurité, promettant de renforcer la présence policière pour lutter contre le crime organisé. « Tout le monde
au Chili
mérite de vivre sereinement »
, a affirmé la candidate de gauche.
Jeannette Jara, 51 ans, a gagné en popularité en tant que ministre du Travail du gouvernement Boric. La candidate de la gauche propose notamment d’augmenter le salaire minimum à près de 800 dollars, soit 250 dollars de plus que l’actuel. Cette communiste modérée, née dans un quartier populaire et mère d’un fils, défend de son côté davantage de droits pour les femmes, dont la légalisation de l’IVG jusqu’à 14 semaines. Longtemps l’un des pays les plus conservateurs d’Amérique latine, avec une influence marquée de l’Église, le Chili n’a autorisé le divorce qu’en 2004 et levé l’interdiction totale de l’IVG qu’en 2017. L’avortement reste limité aux cas de viol, de risque pour la vie de la mère ou de non-viabilité du fœtus.








