« J’ai tellement de choses à vous raconter. Je ne sais pas comment vous allez faire le tri. » C’est à la fin d’un conseil municipal estival, le 17 juillet, après une dernière joute avec l’opposition, qu’Emmanuel François, maire de Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire), a annoncé sa démission, près de deux ans avant la fin de son mandat. « En fait, j’étais soulagé. C’était dur, éprouvant et tellement frustrant », confie celui qui a été élu lors des municipales de 2020, sans étiquette. Un exemple illustrant la vague de démissions d’édiles, qui frappe le pays, alors que s’est ouvert le Congrès des maires, mardi 19 novembre, à Paris.
A l’origine, le quinquagénaire avait mis sa carrière de médecin généraliste entre parenthèses pour espérer changer sa ville à travers son engagement en politique, pour lui « insuffler une nouvelle dynamique », disait-il à l’époque. « La métropole m’a vu arriver avec une certaine envie de changer les choses, une certaine pureté, j’ose le dire. » Peu après sa démission, son entourage politique décrivait un homme épuisé et découragé, surtout après l’incendie criminel de son cabinet médical, en septembre 2022. Mais les raisons sont bien plus diverses.
Jusqu’à l’arrivée de M. François, Saint-Pierre-des-Corps a toujours été un bastion du Parti communiste français. La maire précédente, Marie-France Beaufils, y a régné pendant trente-sept ans (de 1983 à 2020). En lui succédant aux manettes de cette ville de 15 000 âmes à la périphérie de Tours, il dit avoir côtoyé une opposition féroce. « Nous n’avions aucune étiquette particulière sauf une personne, au MoDem », explique-t-il, en reprochant à l’opposition d’avoir « toujours fait passer » son équipe comme « de droite » pour « cliver, sans doute ».
Ego, réseaux, intérêts
Il découvre aussi une économie exsangue : « En 2021, on vote à nouveau un budget en déséquilibre mais avec nul autre choix que d’augmenter les impôts. Au final, quand je suis parti, nous étions en excédent. Pour cela, il aura notamment fallu commencer à se défaire d’un patrimoine immobilier en ruine, qui n’avait jamais été entretenu », affirme-t-il, convaincu qu’« il faut d’abord générer de la richesse pour espérer sortir les habitants de leurs difficultés ».
Emmanuel François, qui dit avoir dû gérer des agents municipaux au bout du rouleau, évoque quelques erreurs de casting au sein de sa propre équipe municipale. Les remaniements qui s’imposaient alors ont été douloureux. « Quand certaines personnes décrochent un mandat d’adjoint ou de conseiller, elles ont l’impression de prendre du galon dans la vie. Risquer de perdre ce mandat, c’est un peu comme perdre sa fierté, sa dignité. »
Il vous reste 42.13% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.