Le 10 novembre, les concurrents du Vendée Globe s’élanceront pour un tour du monde à la voile sans assistance et sans escale.
Sylvia Amicone reçoit cette semaine dans « Impact Positif » Clarisse Crémer, navigatrice professionnelle.
Elle évoque ses combats pour l’égalité femmes hommes dans son sport.
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Impact positif
La mer à perte de vue. Des tempêtes, des zones sans vent, une houle déroutante… à partir du 10 novembre, pendant près de trois mois, 40 marins vont défier les courants sans assistance et sans escale. Parmi eux, six femmes.
Clarisse Crémer, une d’entre elle, raconte son sentiment dans le podcast de celles et ceux qui ont un impact positif sur la société et sur le monde, à écouter ci-dessus. L’émission est diffusée tous les samedis après-midi sur LCI, canal 26 de la TNT. L’an dernier, alors qu’elle prépare les qualifications pour le Vendée Globe, la navigatrice professionnelle tombe enceinte et se voit lâchée par son sponsor. « Je ne me suis jamais sentie freinée par ma condition féminine dans mon parcours. Mais pendant ma grossesse, je me suis sentie plus seule et ça a été difficile d’arrêter mon projet », révèle la navigatrice. En difficulté, elle en parle ouvertement avec l’organisation de la course et tente avec succès de faire évoluer les règles. Elle réussit finalement à se qualifier en terminant les quatre courses transatlantiques. « Je me bats depuis quatre ans pour me qualifier. Beaucoup de personnes dans la navigation ne prennent pas en compte les spécificités féminines comme la maternité », regrette-t-elle. Elle se donne un défi : « Je veux faire en sorte que les femmes ne choisissent plus entre leur désir de maternité et leur carrière sportive ».
Beaucoup de sportives se reconnaissent dans le combat de l’ancienne entrepreneuse. Sur son bateau, sa bannière « Race for Equity » se déploie. Objectif : défendre et encourager l’équité dans le monde de la course au large. « Hommes et femmes seront toujours différents, nous n’avons pas le même corps et nous n’avons pas les mêmes choix à faire. Mais malgré les différences, il faut modifier les règlements de nos sports pour que la grossesse ne devienne pas un moment aussi douloureux et difficile. »
Défenseuse de l’environnement
En 2020, pour sa première participation, Clarisse Crémer met 87 jours et termine douzième. Elle ambitionne de faire mieux sans cacher ses appréhensions. Elle en a rédigé une bande dessinée, « J’y vais, mais j’ai peur, journal d’une navigatrice » : « Je voulais montrer mes sentiments et mes fragilités. J’ai le mal de mer, j’ai des incertitudes. C’est vertigineux de se lancer dans une aventure que l’on ne contrôle pas. La notion de peur fait partie du chemin et de ce que je dois accepter pour réussir à avancer. J’ai hâte de partir, mais ça reste un défi périlleux. »
Dans le chenal de départ, aux Sables-d’Olonne, six femmes mettront les voiles. La voile reste un des seuls sports mixtes où femmes et hommes partent sur un même pied d’égalité. Mais la navigatrice veut que l’on retienne sa condition de marin avant tout : « Je veux que l’on me considère par ma performance et mon expérience. Je ne veux pas que l’on me félicite parce que je suis la première des femmes. Je veux montrer aux jeunes femmes que l’on peut exister autrement. »
Autour d’elle, dans l’immensité de l’océan, Clarisse Crémer croise des baleines, des oiseaux et des poissons extraordinaires. Mais au milieu de nulle part, des déchets s’accumulent : « Je tombe sur des bouteilles de lessive et du plastique de toute sorte. Je me retrouve aux premières loges d’un phénomène qui devrait figurer à la une de tous les journaux. » Lucide, elle reconnaît qu’elle ne fait pas tous les efforts pour protéger la planète : « Je ne me sens pas forcément légitime, je ne suis pas parfaite, mon activité a un impact sur la nature. Mais j’ai à cœur de rester transparente sur ce que je vois sans tomber dans le pessimisme. Les océans sont sublimes et majestueux, mais ils restent très fragiles. »