L’année 2024 n’aura pas seulement été celle d’une crise politique sans précédent, ouverte par la dissolution de l’Assemblée nationale, et marquée par la paralysie du pays, la fragmentation du paysage politique et la polarisation extrême des opinions. Elle a aussi entériné la quasi-disparition de la thématique environnementale de l’agenda politique. La formation du dernier gouvernement est à cet égard révélatrice : confirmée à son poste, la ministre de la transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, passe du neuvième au douzième rang protocolaire, le climat disparaît de sa titulature et elle perd l’énergie. En 2017, on s’en souvient, Nicolas Hulot avait été nommé ministre d’Etat, troisième dans l’ordre protocolaire du gouvernement, et cette dégringolade illustre le reflux des préoccupations environnementales au cours des sept dernières années – au cœur du pouvoir, et par contagion dans la conversation publique et la société.
Les mots d’ordre ont subtilement glissé. Sur le front climatique, il est de plus en plus question d’« adaptation » : ce n’est rien d’autre, en creux, qu’une manière d’accepter que la société thermo-industrielle et le climat terrestre restent sur une trajectoire de collision, et qu’il faudra encaisser le choc. Sur les autres sujets liés à l’environnement – santé, biodiversité, pollutions, etc. –, l’encéphalogramme s’est complètement aplati, les gouvernements successifs ne sacrifiant même plus aux politesses déclaratives d’usage. On ne prend plus la peine de faire semblant ; l’ordre des priorités est assumé.
Elargir la focale, regarder hors de France, n’offre pas de l’horizon une image très différente. Bien au contraire. La capture de grands médias ou des réseaux sociaux par les droites extrêmes, la bascule à droite du Parlement et de l’exécutif européens, le retour de la guerre sur le Vieux Continent et l’arrivée à la Maison Blanche d’un néofascisme décomplexé consacrent sans doute l’entrée dans une période longue de relégation et d’oubli de la question environnementale.
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