Michel Barnier réunissait, lundi 4 novembre au matin, ses ministres en séminaire dans le but de faire émerger, d’ici à la fin de l’année, des propositions à mettre en œuvre sur trois ans. Les membres du gouvernement sont arrivés à Matignon avant 9 heures, pour une matinée de travail.
Le premier ministre, accaparé depuis sa nomination il y a deux mois par l’urgence de la préparation du budget 2025, veut montrer qu’il se projette au-delà de cette échéance. Et ce, sans se soucier de l’épée de Damoclès du vote d’une motion de censure en décembre quand il engagera vraisemblablement la responsabilité de son gouvernement pour faire adopter définitivement ces périlleux projets de loi de finances.
« Vision à cinq ans, action à trois ans », tel est le nouveau leitmotiv à Matignon, en référence à 2029, date fixée pour le retour de la France dans les clous budgétaires européens, et 2027, prochaine présidentielle.
Manque d’unité
Après un premier séminaire en septembre pour préparer sa déclaration de politique générale, Michel Barnier veut, par cette deuxième « rencontre collective », puis une troisième en décembre, aboutir à « des propositions concrètes » pour répondre aux « priorités des Français » qui seront présentées dans un plan d’action, selon son entourage.
Au menu, lundi, de la quarantaine de ministres, cinq thématiques : Etat-collectivités, travail-prestations sociales, immigration-intégration, outre-mer et simplification. Un ministre référent pilotera chaque thématique, et l’objectif sera de définir « une ou deux mesures prioritaires » à mettre en œuvre, selon Matignon.
Deux ministres doivent faire des interventions sur le contexte du moment : le ministre délégué chargé de l’Europe, Benjamin Haddad, devait commencer sur « les enjeux européens », suivi par le ministre de l’économie, Antoine Armand, qui rendra compte des assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale.
Le séminaire se conclura par un déjeuner « dans un objectif de cohésion », alors que le « socle commun » s’illustre par ses désaccords sur nombre de sujets.
Ce manque d’unité se voit quasi quotidiennement à l’Assemblée sur les textes budgétaires peu défendus ou même contestés par une partie de la majorité. Le gouvernement a été ainsi défait à de nombreuses reprises sur les questions fiscales, le dernier exemple en date étant la refonte des cotisations patronales rejetée jeudi par les macronistes, la droite et le Rassemblement national (RN).
« C’est pas parce qu’on a un avis qu’on est un opposant »
L’objectif du séminaire est aussi de « veiller à l’esprit d’équipe et au collectif », selon les services de la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon. « Nous allons faire des progrès pour décider mieux ensemble et s’écouter avant de prendre des décisions, malgré les circonstances d’extrême urgence », a promis le premier ministre à l’issue de la réunion
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« Il y a un besoin que, dans le pack qui s’est constitué autour de Michel Barnier, on essaie de définir ce sur quoi on est d’accord pour que ça suscite une forme de mobilisation », a reconnu dimanche le chef de file des députés MoDem, Marc Fesneau, dans « Questions politiques » (France Inter, Le Monde, France Télévisions), en appelant le gouvernement à « tenir compte des débats parlementaires », par exemple la pérennisation de la surtaxe sur les hauts revenus votée par la gauche et le MoDem.
« C’est pas parce qu’on a un avis qu’on est un opposant, c’est pas parce qu’on n’est pas complètement alignés en rang d’oignons qu’on est un opposant », a-t-il relativisé.
Les députés reprendront lundi l’examen de la partie recettes du budget de la Sécurité sociale avec à la clé un probable rejet, ce qui vaudrait refus de l’ensemble du texte.
Le volet dépenses ne serait alors pas examiné, ce qui épargnerait au gouvernement une discussion perdue d’avance sur le report au 1er juillet de l’indexation des retraites, honni de toutes parts.
Les députés s’attelleront ensuite de nouveau aux discussions sur la partie recettes du budget de l’Etat, alors qu’il reste quelque 1 500 amendements à débattre. Un rejet est attendu, comme en commission, la majorité ne cautionnant pas les milliards d’euros de recettes supplémentaires votés par les députés du Nouveau Front populaire.
Là aussi, un feu rouge emporterait l’ensemble du texte qui partirait au Sénat dans sa version originale, avant une commission mixte paritaire pour que les deux chambres tentent de se mettre d’accord sur une version commune.
Au bout du processus, le gouvernement ne devrait cependant pas pouvoir échapper à un 49.3 pour faire adopter ses deux textes budgétaires, la gauche et le RN ayant déjà annoncé leur intention de voter contre.