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Maurizio Pollini - Italien. Photo © Marion Kalter

Le pianiste italien Maurizio Pollini est mort à Milan, samedi 23 mars, dans la matinée, à l’âge de 82 ans. C’est le Théâtre de la Scala qui en a fait l’annonce sur son site dont la page d’accueil est entièrement dédiée au musicien considéré comme « une référence fondamentale dans la vie artistique du théâtre depuis plus de cinquante ans ».

Depuis 2022, nombreuses avaient été les annulations de concert pour raisons de santé, souvent à la dernière minute, comme le 21 août de cette année-là, quand Maurizio Pollini avait dû renoncer à un récital, en raison de « problèmes cardiaques aigus », selon les termes employés par Markus Hinterhäuser, le directeur artistique du festival de Salzbourg, où il était programmé, ou quelques mois plus tard, 5 novembre, à Turin, où le soliste avait prévu de se produire par solidarité avec les victimes des inondations qui venaient de dévaster une partie de l’Italie.

Le grand artiste a donc péniblement quitté la scène des concerts sur laquelle il s’était très tôt distingué. Tant par son jeu fait de prospections réfléchies et de fulgurances instinctives que par ses programmes dans lesquels la musique contemporaine, de Pierre Boulez (dont la 2e Sonate le fascinait) à Karlheinz Stockhausen (avec une prédilection pour le Klavierstück X), occupait une place de choix.

Un pianiste humaniste

D’un naturel discret, cet homme d’une grande élégance ne manquait pas de sortir de sa réserve, au clavier – à l’instar de son maître Arturo Benedetti Michelangeli (1920-1995) qui se disait timide sauf quand il s’agissait de musique – comme en société, pour servir sous différentes formes un idéal de démocrate. Au début des années 1970 on l’a vu jouer dans une usine occupée, profiter d’un concert pour dénoncer les bombardements du Nord-Vietnam par les Etats-Unis ou réagir au sort du président chilien Salvador Alliende, victime du coup d’Etat militaire qui porta au pouvoir Augusto Pinochet en septembre 1973.

Engagé, comme son grand ami le chef d’orchestre Claudio Abbado (1933-2014), d’un point de vue plus humaniste que politique, Maurizio Pollini fit encore entendre sa voix en 2011 lors d’une manifestation de grande ampleur ayant pour but la démission de Silvio Berlusconi, alors Président du conseil. Le respect d’une ligne de conduite claire et inaltérable par-delà les années détermine également son parcours d’interprète privilégiant quelques compositeurs phares, parmi lesquels Frédéric Chopin et Ludwig van Beethoven, au détriment d’autres musiciens pourtant « adorés », tels que Jean-Sébastien Bach (abordé sur le tard), Maurice Ravel (de loin en loin) et Domenico Scarlatti (jamais enregistré). Des renoncements jugés très douloureux mais justifiés par la volonté de faire de certains chefs-d’œuvre les compagnons de toute une vie. Par exemple, les trois dernières sonates de Beethoven, gravées pour Deutsche Grammophon en 2020, près d’un demi-siècle après les avoir enregistrées pour la première fois.

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