Dimanche 7 juillet, le meeting de Paris avait de beaux airs de répétition générale pour la plupart des athlètes s’apprêtant à participer aux Jeux olympiques (du 26 juillet au 11 août). Si la journée a commencé sur une mauvaise note avec la blessure du décathlonien Kevin Mayer sur le 110 m haies, elle s’est poursuivie d’une bien plus belle manière pour de nombreux athlètes, qui ont prouvé qu’ils étaient prêts à partir en quête de médailles. Au stade Charléty, plusieurs records sont tombés au cours de l’après-midi, à commencer par celui du saut en hauteur féminin.
Depuis 1987, la marque de référence était détenue par la Bulgare Stefka Kostadinova (2 m 09). Un record balayé par un bond sensationnel de Yaroslava Mahuchikh. Championne du monde en titre, l’Ukrainienne s’est élevée au-dessus de la barre fixée à 2 m 10 pour subtiliser le record et apporter un peu de baume au cœur à son pays.
« Ce sont des sentiments incroyables. Toutes mes pensées vont à ma nation, l’Ukraine. Je montre que nous n’abandonnerons jamais et que nous nous battrons jusqu’au bout, a expliqué l’athlète en zone mixte. En Ukraine, je sais que c’est difficile mais je sais aussi que de nombreuses personnes regardent [les compétitions d’athlétisme]. Lors des championnats d’Europe [à Rome, en juin], quand j’ai sauté, beaucoup de soldats et de gens m’ont écrit : “Merci pour les émotions !” Et maintenant j’inscris l’Ukraine dans l’histoire de l’athlétisme mondial, avec ce record. »
Kipyegon améliore sa propre marque
Visiblement en très grande forme, Mahuchikh avait déjà battu son record personnel un peu plus tôt dans le concours en passant une première barre à 2 m 07. « Aujourd’hui, c’était si facile à 2 m 07 que je me suis dit que je devais tenter le record du monde. Je sentais que je pouvais le faire. Mon équipe et moi avons beaucoup travaillé et maintenant nous sommes prêts pour Paris dans deux semaines [trois, en réalité]. J’ai hâte. »
La porte des records ouverte, Faith Kipyegon s’est engouffrée dedans. En habituée du stade Charléty, où la Kényane avait battu le record du monde du 5 000 m l’an passé, la coureuse de 30 ans, double championne olympique du 1 500 m, a survolé cette distance. Avec son chrono de 3 min 49 s 04, elle abaisse de 7 centièmes de seconde la meilleure marque de l’histoire, dont elle était déjà détentrice.
« J’étais venue ici pour savoir comment j’étais en vue de défendre mon titre olympique dans quelques semaines, a-t-elle simplement expliqué après sa course. Je n’avais pas en tête de battre le record du monde… Je voulais seulement courir le mieux possible, je venais pour tester ma forme. » Excellente, donc.
Après un retour prévu au Kenya, elle se projette déjà sur les Jeux, son « prochain gros objectif ». Et, alors que la fête, dimanche, se terminait par un spectacle pyrotechnique, la Kényane rêvait de la même ambiance début août : « J’espère que le public aux Jeux sera le même qu’aujourd’hui. L’énergie était si forte, merci aux fans d’être venus. J’ai hâte de les revoir dans quelques semaines. » Sa démonstration du jour résonnait comme une belle promesse olympique.
Des records pour Guillemot, Finot et Tual
S’ils n’ont pas tutoyé les meilleures marques mondiales, les Français ont également brillé à Paris. Derrière Kipyegon, Agathe Guillemot s’est adjugée le record de France du 1 500 m en 3 min, 58 s 05. « C’était digne d’une finale olympique, j’avais vraiment comme objectif de battre ce record, a réagi Guillemot. Moins de quatre minutes à la maison, j’ai l’impression que ça me réussit. »
Elle avait peut-être été inspirée par sa compatriote, Alice Finot, ayant elle aussi repoussé les murs du record national sur le 3 000 m steeple, en terminant sa course en 9 min 05 s et 01. A 33 ans, elle a retranché d’un seul coup une seconde à un record qui était déjà en sa possession. Insuffisant toutefois pour l’emporter face à la championne du monde en titre bahreïnie Winfred Yavi Mutile.
Pendant que le Suédois Armand Duplantis remportait le concours du saut à la perche mais manquait, pour cette fois, un nouveau record du monde, Gabriel Tual s’est lui aussi illustré sur le 800 m. Le récent champion d’Europe a pris la troisième place du meeting, et a surtout battu lui aussi un record de France, en 1 min 41 s 61. Loin, très loin devant le temps de Pierre-Ambroise Bosse (1 min 42 s 53), établi en 2014. « Là je suis sur la Lune », a réagi le demi-fondeur de 26 ans après sa course. « C’est dingue. A l’entraînement, on sent quand on a des gros chronos, je me disais 1 min 42 sec, c’est jouable, mais de là à faire 1 min 41 sec, même moi je crois que je ne réalise pas. C’est lunaire, c’est lunaire ! »