Le calcul quantique tire sa force d’un objet curieux, le qubit, pour bit quantique. Là où un transistor de processeur d’ordinateur ou de téléphone peut prendre les valeurs 0 ou 1 (fermé ou ouvert), un qubit peut être à la fois 0 et 1, et même n’importe quel mélange des deux, 10 % de 1 avec 90 % de 0, ou 33 % de 1 avec 67 % de 0… Les spécialistes parlent de superposition quantique, métaphoriquement représentée par le chat de Schrödinger, à la fois mort et vivant. Cela signifie qu’un ordinateur classique à N bits ne manipule à un instant qu’une seule des 2N valeurs possibles, mais qu’un ordinateur quantique de N qubits, travaille simultanément avec les 2N valeurs possibles. On comprend mieux le potentiel de ces machines pour résoudre un ensemble de problèmes difficiles.
Plusieurs images peuvent être mobilisées pour saisir l’avantage des superpositions. S’il s’agit de trouver le chemin de la sortie d’un labyrinthe, la méthode traditionnelle consisterait à essayer tous les chemins l’un après l’autre. En quantique, tous les chemins sont explorés en même temps par un super-état quantique, et une mesure finale sur ce qui sort permet de reconstituer le bon trajet.
« On peut aussi voir ce fonctionnement comme l’application d’opérations successives dans le temps qui permettent de faire interférer entre elles plusieurs solutions possibles d’un problème, de façon à faire “monter” les bonnes et “descendre” les mauvaises », explique Alastair Abbott, chercheur au centre Inria de l’université Grenoble-Alpes.
La recette de l’algorithme
Ces opérations, en informatique, s’appellent des portes logiques. Elles sont familières pour les ordinateurs classiques, qui rassemblent des transistors pour faire des opérations logiques et construire la recette de l’algorithme. Par exemple, si on entre 0 dans le composant, il sort 1, et si on entre 1, il sort 0.
Idem en quantique, mais les portes agissent sur des qubits. « C’est comme manipuler le rayon d’une sphère dont la pointe parcourt la surface. Les portes font tourner cette pointe… », explique Mnacho Echenim, professeur à Grenoble INP-Ensimag.
Un des plus célèbres algorithmes, dit « de Grover », permet de trouver dans un annuaire le nom d’un abonné à partir de son numéro. Pour un annuaire de N lignes, il faut en moyenne N/2 étapes par une méthode classique. En quantique, c’est racine carrée de N, qui est bien plus petit.
Ajoutons que ces algorithmes tirent aussi profit d’une autre propriété quantique, la capacité à intriquer deux qubits entre eux (ou trois, quatre…). C’est-à-dire à faire en sorte qu’il ne soit pas possible de séparer les propriétés de chaque membre. Ce phénomène, qui a valu le Nobel 2022 à trois physiciens dont le Français Alain Aspect, est déjà exploité dans des protocoles de communication (quantique) afin de garantir la sécurité de la transmission.
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