L’évêque de Fréjus-Toulon, Dominique Rey, considéré comme l’un des évêques les plus conservateurs de France, a annoncé mardi 7 janvier sa démission à la demande du pape François, deux ans après un audit réclamé par le Vatican sur sa gestion controversée du diocèse.
Agé de 72 ans, il espérait continuer sa mission jusqu’à 75 ans, l’âge automatique de départ à la retraite pour un évêque. Le Vatican en a décidé autrement : « Le nonce m’a informé que le Saint-Père me demandait de déposer ma charge d’évêque diocésain de Fréjus-Toulon », a fait savoir Dominique Rey, 72 ans, dans un communiqué. « Face aux incompréhensions, aux pressions et aux polémiques, toujours néfastes pour l’unité de l’Eglise, le critère ultime de discernement reste pour moi celui de l’obéissance au successeur [du pape] Pierre », ajoute l’évêque qui aura passé un quart de siècle à la tête de ce diocèse.
Le Vatican n’a pas tardé à accepter cette démission, par voie de communiqué à la mi-journée, annonçant aussi la nomination, pour lui succéder, de François Touvet, qui lui servait de bras droit depuis la fin de 2023.
Depuis deux ans, le diocèse varois était en effet en crise. En 2022, le Vatican avait, décision rarissime, suspendu l’ordination de prêtres et déclenché un audit qui avait débouché sur la nomination d’un évêque coadjuteur, François Touvet, jusque-là évêque de Châlons-en-Champagne (Marne). Ce dernier, chargé depuis novembre 2023 de l’administration, du clergé, de la formation des séminaristes et des prêtres, laissait de fait peu de pouvoirs à Dominique Rey.
Critiqué au sein de l’Eglise
Ce qui lui était reproché n’avait toutefois rien à voir avec les nombreux scandales de violences sexuelles qui ont secoué l’Eglise ces dernières décennies. Issu de la communauté de l’Emmanuel (un pilier du « renouveau charismatique »), ce promoteur d’un catholicisme remusclé était critiqué au sein de l’Eglise pour son style qui a pu s’inspirer de pasteurs évangéliques américains.
Sa politique d’accueil de communautés nouvelles faisait également débat, au sujet des traditionalistes et adeptes de la messe en latin par exemple, et d’autres charismatiques, venant en particulier d’Amérique latine. « Il m’est principalement reproché l’accueil trop large de communautés ou de vocations sacerdotales et religieuses, en particulier issues du monde traditionnel, ainsi que des dysfonctionnements dans la gestion économique et financière du diocèse », concède mardi l’évêque dans une interview à l’hebdomadaire Famille chrétienne.
Depuis, il n’y a pas eu « d’éléments nouveaux » et « le Vatican a contraint Mgr Rey à la démission, suscitant un sentiment d’injustice. Mais il n’est pas révolté et obéit », a rapporté à l’Agence France-Presse l’entourage de l’évêque. En un quart de siècle, il a ordonné plus de 160 prêtres et ce diocèse du sud-est de la France, une région à la fois touristique et rurale, compte aujourd’hui 250 prêtres sur 150 communes. La Conférence des évêques de France a, dans un communiqué laconique, souhaité « une belle nouvelle étape pastorale au diocèse de Fréjus-Toulon et à ses fidèles ».
S’il refuse l’étiquette « trop passéiste » de conservateur, Dominique Rey n’en avait pas moins apporté un soutien marqué en 2012-2013 à La Manif pour tous, mouvement qui s’opposait au mariage homosexuel. L’accueil offert en 2015 à Marion Maréchal lors d’une université d’été catholique dans le Var avait aussi suscité l’émoi dans les rangs chrétiens. « La sphère traditionnelle doit être dans l’Eglise, pas à part. Dans mon diocèse, j’ai eu à cœur qu’elle ne stagne pas dans un monde parallèle », a-t-il dit mardi à Famille chrétienne.