Je pense à toi, mon cher Boualem, en ces jours où le froid s’insinue dans les os et dans les tripes.
Je pense à toi, otage d’un régime totalitaire qui n’a pas lu une seule ligne de tes œuvres romanesques.
Je pense à toi en ces moments où nous sommes nombreux à être avec toi et la clameur de nos cris devrait te parvenir malgré l’épaisseur des murs qui te retiennent prisonnier.
Ceux qui te maltraitent ne savent pas qu’aucune humanité n’est possible sans écrivains, sans créateurs, sans liberté. L’humanité serait alors sèche et nue. Elle serait creuse et rongée de l’intérieur. Cette humanité, aujourd’hui symbolisée par toi en prison, souffre, car tu n’as commis aucun crime. Tu as exprimé un fait, même pas une opinion, mais un fait attesté par l’histoire. Mais tes geôliers écrivent l’histoire à leur manière, avec déni et oubli, avec amnésie et refus du réel.
Qu’importe, aujourd’hui, tu es privé d’air et de chaleur, à l’hôpital ou à la prison, et on t’a réduit à un immense silence. Un silence qu’on entend. Il nous arrive partout et nous savons, nous percevons ce que tu endures.
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