« Lequel de nous portera l’autre ? », de Violaine Lison, avec les carnets de tranchées de Léonce Delaunoy, L’Esperluette, 208 p., 22 €.
Lequel de nous portera l’autre ? est un livre-mouchoir. Celui dans lequel Léonce, brancardier sur le front belge, enveloppa ses carnets de tranchées pour les envoyer à Herman, l’ami-amour, le « plus que frère », une semaine avant d’être tué par un obus, le 15 octobre 1918, à 25 ans. Une ultime lettre pour que leurs larmes se rejoignent, « cachet de la poste faisant voix ». C’est, aussi, un livre trait d’union : pour que la voix de Léonce trouve une voie jusqu’à Violaine Lison, il faudra cent ans, et maints émissaires : Paul Nackart, ami de séminaire de Léonce avant d’être réquisitionné avec lui, qui a retranscrit ce journal intime dans cinq carnets numérotés ; le petit-neveu de Paul, ami de l’écrivaine, qui les lui confie en 2014.
Commence alors, pour Violaine Lison, une gestation conjointe de douze ans. « Léonce, dit-elle au “Monde des livres”, grandissait en moi. Patiemment mais résolument, il se préparait au jour. Et moi, je grandissais aussi. » Elle publie, dans la maison d’édition belge Esperluète, Ce soir, on dort dans les arbres (avec des dessins de Valérie Rouillier, 2021) et Vous étiez ma maison (avec des peintures de Manon Gignoux, 2022) – « deux livres sur d’autres morts de ma vie ». Affûte son regard, sa langue. Léonce, lui, attend son heure. Elle se rend compte qu’ils se ressemblent : « Les mots. Les images. Les paysages. Les oiseaux. L’émerveillement. Léonce, c’est mon grand frère. Souvent, la nuit, je rêve que je refais son lit dans ma maison. »
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