Lorsqu’on apprend à la fin de l’été qu’aux Etats-Unis, un jeune adolescent, Adam Raine, s’est suicidé après avoir obtenu de Chat-GPT le mode d’emploi nécessaire pour mettre fin à ses jours, non sans s’être confié à lui auparavant sur son malaise, n’y a-t-il pas urgence à restaurer dans notre monde un rapport possible à la parole et à l’autre ? Lorsqu’on commémore les dix ans des attentats du 13 novembre 2015 en France, qui ont mobilisé tant d’équipes de soin d’urgence en milieu hospitalier, de psychologues et de psychiatres pour prendre en charge l’événement traumatique et ses effets d’effraction, n’y a-t-il pas une ironie à émettre un amendement qui condamne « les soins, actes et prestations se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques » ?
L’amendement présenté au Sénat, le 21 novembre, a certes été retiré, mais il se pourrait bien qu’il ne soit que le premier coup présageant d’un acharnement à venir. Au nom d’une cohérence scientifique articulée aux dépenses de santé, cet amendement proposait d’inciter prioritairement « la diffusion des pratiques comportementales, éducatives et de réhabilitation psychosociale » pour mieux effacer de la carte l’apport psychanalytique fondé sur la parole.
Mais que s’agit-il à travers cette incitation de déconseiller, d’interdire, et à l’envers de promouvoir ? Il ne s’agit pas seulement de ne plus donner lieu à remboursement pour des soins se réclamant de la psychanalyse au sein notamment des centres médico-psychologiques, mais aussi de désigner ces prises en charge comme contre-productives et inadaptées, « à différencier des psychothérapies ». Cette distinction délégitime les psychothérapies se référant à la psychanalyse et risque de conduire à la disqualification de tous les praticiens formés depuis la psychanalyse. C’est aussi la destruction du tissu social du soin psychique qui est là préfigurée.
Urgence de l’époque
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