Invité du « 20 heures » de TF1, mardi 26 novembre, le premier ministre, Michel Barnier, a déclaré que « probablement, assurément », le projet de loi de finances pour 2025 serait adoptée en recourant à l’article 49.3 de la Constitution. Cette adoption sans passer par le vote ouvrirait la voie au dépôt d’une motion de censure de la gauche, à laquelle l’extrême droite menace de s’associer, ce qui ferait tomber le gouvernement.
Michel Barnier envisager cette censure par « une alliance dans les votes, improbable mais possible, entre les voix de M. [Jean-Luc] Mélenchon et les voix de Mme [Marine] Le Pen auxquelles se joindraient le Parti socialiste, le Parti communiste et les Verts. Je tombe, le gouvernement s’arrête et qu’est-ce qui se passe ? Il n’y a plus de budget ». Pour le chef du gouvernement, « des turbulences graves sur les marchés financiers » surviendraient en cas de motion de censure adoptée, assurant que les Français avaient envie de « stabilité ».
Interrogé sur les concessions faites aux partis politiques lors des discussions sur le budget, et particulièrement la réduction des économies − alors que le gouvernement en attendait 40 milliards d’euros − Michel Barnier se défend et met en avant un budget qui à l’origine était « perfectible ». « Je l’ai fabriqué avec le gouvernement en quinze jours, a-t-il souligné. Nous ne donnons pas à droite et à gauche, nous entendons les collectivités locales, les entreprises, les partis politiques et associations de retraités (…). Nous trouverons un équilibre au budget. L’objectif est de réduire le déficit de ce budget à 5 % » du produit intérieur brut.
Une réunion à hauts risques mercredi
« Nous empruntons déjà très haut nos taux d’intérêt, les taux d’intérêt que nous sommes obligés de respecter pour financer notre dette avec des investisseurs chinois ou américains. Ils sont actuellement presque au niveau de la Grèce », a ajouté le premier ministre, nommé en septembre à Matignon par Emmanuel Macron pour sortir le pays de la crise politique consécutive à la dissolution de l’Assemblée nationale. L’écart entre les taux d’intérêt de l’emprunt de référence sur dix ans entre la France et l’Allemagne a atteint son plus haut niveau depuis 2012.
Si son avenir est suspendu au Parlement, Michel Barnier a déclaré écarter la possibilité de démissionner et a tenu à se projeter au-delà de la fin d’année 2024 en égrenant « les sujets sur lesquels [il a] envie d’agir (…) : la sécurité au quotidien des Français, la maîtrise de l’immigration et l’interdiction de l’immigration clandestine, sur le travail qui doit payer plus que les allocations, avec une allocation sociale unique, sur la démocratie et peut être le chantier que souhaitent beaucoup de partis à propos de la proportionnelle par exemple ».
Mercredi, une réunion à hauts risques se tiendra sur le projet de financement de la Sécurité sociale, avant une possible activation par le premier ministre de l’article 49.3 sur ce texte. Reçues lundi par Michel Barnier dans le cadre d’une série d’entretiens avec les responsables des groupes parlementaires, les cheffes de file des députés du Rassemblement national, Marine Le Pen, et de La France insoumise, Mathilde Panot, ont réitéré leur menace de censurer le gouvernement sur le budget.
Le premier ministre a aussi reçu mardi les groupes de sa coalition gouvernementale, qui de son côté est divisée sur les hausses d’impôts. Il doit encore échanger dans la semaine avec les responsables socialistes, écologistes et communistes.