Après avoir lancé un avertissement il y a quelques jours, l’Arabie saoudite a agi. La coalition dirigée par Riyad a annoncé, mardi 30 décembre, avoir ciblé des cargaisons d’armes et de véhicules destinées aux séparatistes au Yémen en provenance des Emirats arabes unis.
« En raison des risques et de l’escalade que représentent ces armes, qui menacent la sécurité et la stabilité, les forces aériennes de la coalition ont mené ce matin une opération militaire limitée visant les armes et les véhicules de combat qui avaient été déchargés des deux navires dans le port d’Al-Mukalla », a rapporté l’agence officielle saoudienne SPA.
« Les équipages de deux bateaux ont désactivé leurs systèmes de suivi et déchargé une grande quantité d’armes et de véhicules de combat pour soutenir les forces du Conseil de transition du Sud [STC] », a ajouté l’agence, précisant que les navires étaient arrivés du port de Fujairah, sur la côte est des Emirats arabes unis. Selon la même source, l’opération n’a fait aucune victime, ni de dégât collatéral.
Peu après, l’Arabie saoudite a qualifié le soutien apporté par les Emirats arabes unis aux séparatistes au Yémen de « menace » pour le royaume et la région, après avoir accusé Abou Dhabi de leur avoir livré des armes. Le ministère des affaires étrangères saoudien a exprimé ses regrets face au fait que les Emirats aient « poussé » les séparatistes à mener des opérations militaires à « la frontière sud du royaume (…), constituant une menace pour la sécurité » de l’Arabie saoudite et de la région, en ajoutant que « les mesures prises par l’Etat frère des Emirats arabes unis [étaient] extrêmement dangereuses ».
Appel à évacuer avant les frappes
La coalition avait prévenu, samedi, qu’elle soutiendrait le gouvernement yéménite et riposterait à toute action militaire des séparatistes, les appelant à se retirer « pacifiquement » des provinces récemment conquises.
Dans une vidéo d’images aériennes diffusée sur les réseaux sociaux par l’agence SPA, des mouvements sur des bateaux sont visibles, puis des dizaines de véhicules circulent dans le port avant de se rassembler sur un terrain vague.
Un responsable de l’infrastructure, qui a requis l’anonymat, a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) avoir reçu un appel à évacuer vers 4 heures, heure locale (2 heures à Paris). « L’évacuation s’est terminée, et une frappe a eu lieu un quart d’heure plus tard sur un terrain vague à l’intérieur du port. Le feu brûle toujours. Nous n’avons pas pu amener de camions de pompiers par crainte d’explosions », a-t-il poursuivi. Les autorités ont fermé les routes menant vers le port, a constaté sur place un journaliste de l’AFP.
Washington évite de prendre parti
Ces annonces ont lieu à la suite de frappes sur des positions des séparatistes, lesquels les avaient imputées au voisin saoudien, allié du gouvernement yéménite. Soutenu par les Emirats arabes unis, le mouvement séparatiste du Conseil de transition du Sud s’est emparé au cours des dernières semaines de vastes portions de territoire, notamment dans l’Hadramaout, sans rencontrer de grande résistance. Ses partisans l’appellent à rétablir un Etat dans le sud du Yémen, où une République démocratique et populaire a été indépendante entre 1967 et 1990.
Dans ce contexte tendu, le gouvernement yéménite, reconnu par la communauté internationale, a demandé vendredi à la coalition militaire de prendre des « mesures » pour le soutenir. Le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio, avait appelé vendredi à la « retenue », tout en évitant de prendre parti entre l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, deux partenaires-clés de Washington.
Ces nouvelles tensions pourraient fragiliser davantage encore le pays le plus pauvre de la péninsule Arabique, au cœur de rivalités régionales. Un conflit a éclaté en 2014 entre le gouvernement et ses alliés, dont le STC, et les rebelles houthistes pro-iraniens, faisant des centaines de milliers de morts, morcelant le pays et provoquant l’une des pires crises humanitaires au monde. Une trêve conclue en 2022 est globalement respectée.
La coalition dirigée par l’Arabie saoudite, rivale de l’Iran, avait été créée en 2015 pour apporter son soutien au gouvernement yéménite.









