Le Printemps de la ruralité, lancé le 29 janvier par la ministre de la culture, Rachida Dati, a débouché, le 11 juillet, sur un plan pour améliorer l’accès aux activités culturelles dans les campagnes. Espérons que cela soit suivi d’effets. Mais constatons en même temps que la consultation conduite et ses résultats n’ont porté que sur une partie du problème désigné par la ministre quand elle disait que la ruralité est une forme « d’impensé de notre modèle culturel », et que « tous les Français, absolument tous, peuvent être des acteurs culturels, des acteurs de leur propre culture ». Ces mots laissaient espérer un programme plus large qu’une « amélioration de l’offre culturelle » dans une démarche partant du sommet vers la base.
Pour être davantage acteur de sa propre culture, le monde rural a aussi besoin d’une maïeutique l’aidant à accoucher et à valoriser ce qu’il porte en lui. Ce fut la démarche de l’éducation populaire confiée au commissariat à la jeunesse et aux sports en 1959 quand le ministère de la culture eut pour mission de promouvoir la « grande culture » participant au rayonnement mondial de la France. Il faudrait une réorganisation des missions et du périmètre de ce ministère pour que son action soit cohérente avec l’ambition affichée par la ministre.
La maïeutique se retrouve dans le « Voir, juger, agir » de la Jeunesse agricole catholique, grâce à laquelle des centaines de milliers de ruraux se sont formés dans les années 1950 et 1960. Il y eut la pédagogie active et émancipatrice de Peuple et culture, un réseau d’associations d’éducation populaire fondé à l’issue de la seconde guerre mondiale, et bien d’autres expériences.
Véritables documents historiques
Cette maïeutique s’est concrétisée par des expressions artistiques et littéraires dont les 1 300 ouvrages des 500 auteurs qui se sont succédé au sein de l’Association des artistes et écrivains paysans ne sont qu’une partie. Parmi elles figurent de véritables documents historiques, comme les histoires et récits de vie dans la tradition d’Emile Guillaumin (1873-1951), fondateur de l’un des premiers syndicats agricoles. Il publia en 1904 La Vie d’un simple, ouvrage sélectionné pour le prix Goncourt.
Quels que soient son âge, sa profession et sa formation, chacun peut être co-acteur de sa culture, comme dans l’exemple du concours des villages fleuris qui a contribué à faire de la France un des plus beaux pays du monde. Dans un petit village du Bas-Rhin dévasté par la guerre et infesté de mines, l’abbé Wendling (1906-1990) avait entrepris de remplacer chacune de ces mines par une fleur. L’idée s’est propagée jusqu’à la création de ce concours, en 1959, par Robert Buron (1910-1973), ministre des transports, des travaux publics et du tourisme (1958-1962).
Il vous reste 44.05% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.