Cela sonne comme une alerte. Dans une « communication aux pouvoirs publics », rendue consultable le jeudi 7 novembre, la Défenseure des droits, Claire Hédon, dresse « un constat alarmant » sur la situation dans les prisons françaises. Elle réclame des « réponses urgentes » tout en faisant une liste de recommandations. Ce travail accompagne la publication, le même jour, d’un « guide pratique pour les détenus », afin de les aider à connaître et à faire respecter leurs droits.
Dans un document de treize pages, Mme Hédon rappelle que des recommandations avaient déjà été faites en 2013 « pour que les droits des personnes détenues soient pleinement respectés ». Mais, note encore la Défenseure, « plus de dix ans après, la situation dans les établissements pénitentiaires français s’est aggravée, notamment en raison de la surpopulation carcérale ».
Les constats et suggestions établis par Claire Hédon sont les mêmes que ceux qui sont réalisés tous les ans par Dominique Simonnot, la contrôleuse générale des lieux de privations de liberté (CGLPL) dans son rapport annuel. A chaque fois la surpopulation carcérale est pointée du doigt comme la cause principale (mais pas unique) d’une situation catastrophique. Il est vrai qu’au 1er octobre, 79 631 personnes étaient en prison, pour 62 279 places opérationnelles, soit une densité carcérale de 127,9 %. Un taux sans précédent. Plus de 3 800 détenus sont contraints de dormir sur un matelas au sol, contre 2 480 au 1er octobre 2023. Le taux d’occupation est, en moyenne, de 155 % en maison d’arrêt, où sont incarcérés les détenus en attente de jugement, et donc présumés innocents, ainsi que ceux qui sont condamnés à de courtes peines. Il atteint ou dépasse les 200 % dans quatorze établissements ou quartiers pénitentiaires.
Mesures fortes
La Défenseure des droits souligne que cette surpopulation « conduit à des conditions de détention indignes, dans toutes leurs dimensions : infestations de rongeurs, de cafards, et de punaises de lit ; sanitaires et installations électriques parfois vétustes et détériorés ; “promenades” limitées à une heure par jour ; manque de personnel pénitentiaire d’insertion et de probation, qui compromet le travail sur les faits et la peine ainsi que la préparation à la sortie ; insuffisance des effectifs de personnels de surveillance, qui conduit à l’installation d’un climat de violence. »
Au-delà de la question du respect de la dignité des personnes détenues, la Défenseure des droits appelle à la mise en place de mesures fortes pour lutter contre la surpopulation. Elle plaide – comme la CGLPL, mais aussi de nombreux élus de tous bords politiques et la plupart des spécialistes de la question – pour la mise en place d’un mécanisme « contraignant » de régulation carcérale. Une piste qui n’est pas celle que défend le gouvernement de Michel Barnier – ni le ministre de la justice, Didier Migaud. Sans être fermé à la discussion, ce dernier préfère privilégier l’achèvement de la construction de 15 000 nouvelles places de prison, lancée par son prédécesseur Eric Dupond-Moretti. Le garde des sceaux met aussi en avant le recours aux peines alternatives à l’emprisonnement, comme les travaux d’intérêt général.
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