Le procès des viols de Mazan est celui « de la lâcheté », a accusé mardi 19 novembre Gisèle Pelicot, la victime principale de ce dossier hors norme, estimant qu’il était temps que la société « change de regard » au sujet du viol.
« Pour moi, ce procès sera le procès de la lâcheté. Il est grand temps que la société machiste, patriarcale, qui banalise le viol, change. Il est temps qu’on change le regard sur le viol », a insisté la septuagénaire, victime de viols répétés, pendant une décennie, par son mari, qui la droguait, et des dizaines d’inconnus qu’il recrutait sur Internet.
Après l’audition des trois enfants Pelicot et l’interrogatoire des deux derniers des 51 accusés, lundi, Gisèle Pelicot est revenue à la barre, mardi, pour répondre à nouveau aux questions des avocats de la défense. La parole sera donnée une dernière fois à son ex-mari, avant le début des plaidoiries, probablement mercredi.
« J’ai vu défiler à la barre des individus qui nient le viol », pour la plupart, et « j’ai beaucoup de mal face à cette banalité. J’ai envie de dire à ces hommes : à quel moment quand vous pénétrez dans cette chambre Mme Pelicot vous a donné le consentement ? A quel moment face à ce corps inerte vous prenez conscience ? A quel moment vous n’allez pas le dénoncer à la police ? », a dénoncé Gisèle Pelicot. « J’ai entendu : “j’étais téléguidé”, j’ai entendu “j’ai bu un verre d’eau, j’étais drogué”. Mais à quel moment ils n’ont pas percuté ? », insiste-t-elle.
Appel à un « véritable sursaut »
Les déclarations de Gisèle Pelicot résonnent avec un mouvement de fond qui s’opère dans la société française. Plus de 400 organisations et personnalités, parmi lesquelles Angèle, Judith Godrèche et Vanessa Springora, ont appelé à manifester contre les violences faites aux femmes le 23 novembre en France, pour réclamer un « véritable sursaut », sept ans après le début de la vague #metoo. Des manifestations seront organisées dans des dizaines de villes, parmi lesquelles Paris, Bordeaux, Marseille ou Lille, deux jours avant la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, selon un appel relayé jeudi par le collectif #noustoutes et signé, notamment, par la Fondation des femmes et le Planning familial.
« Depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, nous décomptons déjà plus d’un millier de féminicides (…). Et qui s’en indigne ? », écrivent associations et personnalités dans ce texte, qui ajoutent : « Les gouvernements successifs ont multiplié les promesses, mais les moyens sont dérisoires et en baisse, l’action politique est quasi inexistante. » Le procès de Mazan « confirme » que les auteurs de violences « ne sont pas des monstres, ce sont des hommes de notre entourage » et que ces violences « concernent tout le monde », soulignent les signataires.
La secrétaire d’Etat chargée de l’égalité femmes-hommes, Salima Saa, a promis au début de novembre qu’elle annoncerait « des mesures concrètes et efficaces » le 25 novembre, visant notamment à « améliorer les dispositifs d’aller-vers » les victimes, en particulier en milieu rural, à renforcer « l’accueil et la prise en charge des victimes » par une « formation des acteurs en première ligne ».