mardi, mai 7
Devant un électrolyseur appelé « Trailblazer », qui devrait produire 2 900 tonnes d’hydrogène par an,  à Oberhausen ( Rhénanie-du-Nord-Westphalie), dans l’ouest de l’Allemagne, le 2 mai 2023.

Après le temps des ambitions, celui des déceptions. Malgré de grandes promesses, celles de décarboner les secteurs de l’industrie et de la mobilité lourde, la filière naissante de l’hydrogène bas carbone – à partir d’électricité renouvelable (éolien et solaire) ou nucléaire – marque le pas. La liste de projets continue bien de s’allonger. Mais la mise en œuvre est loin de suivre, à en juger par le faible déploiement des électrolyseurs. « Que ce soient des responsables politiques ou des entreprises, un certain nombre de gens ont survendu l’hydrogène, disant qu’il allait sauver le monde », reconnaît Philippe Boucly, président du réseau professionnel France Hydrogène. Du côté des entreprises, « cette tendance peut, par exemple, s’observer en cas de levée de fonds ou d’entrée en Bourse ».

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Seuls 12 gigawatts (GW) de puissance d’électrolyse au niveau mondial sont en cours de construction ou ont déjà fait l’objet d’une décision finale d’investissement, selon une étude de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), au début de l’année. Très loin des 360 GW d’électrolyseurs annoncés à l’échelle mondiale pour l’horizon 2030, sachant qu’une capacité d’à peine plus de 1 GW est déjà en service, majoritairement en Chine. « La raison principale est la lenteur à mener les projets planifiés jusqu’aux décisions finales d’investissement, en raison d’un manque d’acheteurs et de l’impact de la hausse des prix sur les coûts de production », synthétise l’AIE.

« Les fondamentaux de l’hydrogène n’ont pas changé, maintient Pierre-Etienne Franc, directeur général d’Hy24, gestionnaire de fonds d’investissement. Sauf que, ces derniers temps, patatras. Différents facteurs ont compliqué les conditions de son essor : inflation, montée des taux d’intérêt, risques géopolitiques, négociations réglementaires… »

« La filière se confronte à la réalité »

Le français Engie traduit bien l’ambiance du moment. En février, l’acteur gazier numéro un dans le pays a annoncé décaler de cinq ans son objectif, affiché en 2021. Il vise désormais 4 GW d’hydrogène « vert », à partir d’énergies renouvelables, pour 2035, et non plus pour 2030. « Le défi est de passer toutes les technologies désormais existantes à une échelle plus grande. C’est ce qui fera véritablement baisser les coûts de production », considère Erwin Penfornis, vice-président de la branche mondiale « énergie hydrogène » d’Air Liquide.

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Cet autre acteur de premier plan entend mettre en service, pour 2026, l’un des plus grands électrolyseurs au monde, près du Havre. « Normand’Hy », c’est son nom, disposerait d’une puissance de quelque 200 mégawatts, soit 0,2 GW. Le projet est estimé à 400 millions d’euros, dont près de la moitié sous forme d’aide publique. A ce jour, la part d’électrolyseurs déjà opérationnels en France est encore infime. Au décompte de la fin de 2023, elle était de l’ordre de 0,03 GW, malgré un objectif gouvernemental (depuis 2020) de 6,5 GW pour 2030.

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