Dans l’épineux dossier « French Bukkake », toujours en cours d’instruction, les protagonistes sont connus. D’un côté, dix-sept hommes qui ont, entre 2013 et 2019, participé à la production et à la diffusion de plusieurs centaines de vidéos pornographiques d’une violence inouïe, qui leur ont valu des mises en examen pour « viols en réunion », « traite d’êtres humains en bande organisée » et « proxénétisme aggravé ». De l’autre, une quarantaine de leurs victimes. Des femmes manipulées, agressées et violées, dont les supplices ont été diffusés en ligne sur des sites pornographiques.
Mais depuis peu, l’affaire compte une partie supplémentaire : Google. Le géant technologique américain, plus précisément son entité californienne Google LLC, a été condamné mercredi 6 novembre par la justice française, dans le cadre d’une procédure judiciaire commencée en 2023 et distincte du volet pénal du dossier. Google était, en effet, poursuivi par l’une des victimes du réseau « French Bukkake » (« FB »). Elle reprochait à la firme américaine d’indexer, sur son moteur de recherche, des sites Internet hébergeant les vidéos des viols qu’elle a subis dans le cadre de tournages de vidéos pornographiques étiquetées FB.
La plaignante a pourtant fait des pieds et des mains pour obtenir leur déréférencement. Elle affirme notamment avoir rempli à plusieurs reprises le formulaire de signalement mis à disposition par Google, qui lui permet de regrouper les demandes de ses utilisateurs concernant la désindexation de certains contenus.
Mais depuis quatre ans, elle n’est parvenue qu’à obtenir des réponses « aléatoires ». « Certaines demandes sont refusées sans justification, d’autres sont acceptées, mais des duplicatas des vidéos concernées (mêmes titres, mêmes contenus) surgissent aussitôt », résument ainsi dans un communiqué du mois d’octobre l’association Osez le féminisme !, partie civile dans le volet pénal du dossier, ainsi que d’autres organisations signataires. « Un supplice sisyphéen pour les plaignantes », qui se retrouvent constamment confrontées à leurs traumatismes.
Contenus pouvant réapparaître
En juillet 2023, un courrier de mise en demeure est donc adressé à Google LLC « sur la base de la loi pour la confiance dans l’économie numérique », relate au Monde l’avocat de la plaignante, Me Romain Darrière. Ce dernier invoque également des violations du droit à l’image, au respect de la vie privée et à la dignité humaine. Mais une fois de plus, la plaignante reçoit une « réponse partielle » de Google quelques semaines plus tard, regrette-t-il.
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