Longtemps inconnu du grand public en dehors des frontières de l’Inde, Gautam Adani, 62 ans, l’homme à la tête du plus vaste conglomérat mondial, est de nouveau sous les feux de l’actualité. Après avoir été accusé, en 2023, de la plus « grande escroquerie de l’histoire des affaires » par la société d’investissement Hindenburg, l’industriel indien, intime du premier ministre indien, Narendra Modi, est désormais dans le viseur de la justice américaine.
Le magnat a été inculpé, mercredi 20 novembre, par un tribunal fédéral de New York pour fraude et corruption, soupçonné d’avoir versé plus de 250 millions de dollars (238 millions d’euros) de pots-de-vin à des fonctionnaires indiens pour obtenir de juteux marchés publics dans l’énergie solaire. Le groupe a rejeté les accusations, affirmant qu’elles étaient « sans fondement », et a promis de les contester devant la justice. L’opposition demande « l’arrestation immédiate » du milliardaire et accuse M. Modi de « protéger » son allié.
Le premier ministre indien n’a pas soufflé mot, mais la nouvelle est un coup de massue. Les deux hommes cheminent ensemble depuis plus de deux décennies. Le duo est si soudé que l’opposition l’a affublé du sobriquet de « Modani ». La réussite de l’un est indissociablement liée à l’autre. Et vice versa.
Fils d’un négociant en textile, issu d’un milieu modeste, Gautam Adani a connu une ascension fulgurante au cours des trois dernières décennies. Il a bâti, dans l’ombre de Narendra Modi, un gigantesque empire familial, dont la capitalisation boursière atteignait près de 170 milliards de dollars, mardi 19 novembre, avant les révélations de la justice américaine. Les ramifications du groupe s’étendent désormais sur presque tous les continents. De l’énergie aux drones militaires, des ports à l’aérospatiale, des mines de charbon à l’agriculture, le magnat s’est aligné sur les priorités stratégiques du gouvernement.
Une relative discrétion
Les deux hommes ont un profil similaire, ils sont peu doués pour les études mais habités par une ambition démesurée. Leur histoire commune se scelle au Gujarat, dans l’ouest de l’Inde, leur terre natale et fief politique de M. Modi, qui en fut le chef de gouvernement de 2001 à 2014. Lorsque les pogroms antimusulmans de 2002, qui firent 2 000 morts, valent à Narendra Modi l’opprobre général, dont celle des milieux d’affaires, inquiets de l’impact des événements sur l’économie, M. Adani refuse de lui tourner le dos. Pour effacer la tache des massacres, M. Modi lance le forum international Vibrant Gujarat, un grand événement, sponsorisé par l’industriel, visant à attirer les investisseurs.
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