Après avoir passé 576 jours en prison, le calvaire d’Homayoun Sabetara, réfugié iranien, continue. Accusé d’être un passeur parce qu’il conduisait un véhicule transportant d’autres migrants depuis la frontière gréco-turque, cet homme aux cheveux grisonnants avait été condamné, en première instance, à dix-huit ans de prison. Mardi 23 avril, la cour d’appel de Thessalonique, dans le nord de la Grèce, a estimé qu’en l’absence d’un témoin-clé à charge – l’un des migrants qui avait voyagé avec le prévenu –, l’audience devait être reportée à septembre pour tenter de retrouver cet individu.
Au lieu d’annuler la procédure faute de preuves, les juges ont même refusé d’accorder au réfugié de 59 ans la libération conditionnelle jusqu’à sa prochaine audience, malgré de graves problèmes de santé. Sa fille de 29 ans, Mahtab, affirme au Monde que « pendant presque deux ans en prison, il n’a pas pu consulter de médecin alors qu’il est atteint d’un cancer et a des problèmes respiratoires ». Ses avocats et les ONG qui ont suivi le procès dénoncent des « erreurs judiciaires flagrantes » et un « procès non équitable ».
Le drame d’Homayoun Sabetara commence le 25 août 2021, lorsqu’il est arrêté par la police aux abords de Thessalonique au volant d’une voiture où se trouvent sept autres migrants. Immédiatement mis en détention provisoire, il est accusé d’avoir organisé le trafic. L’Iranien dit avoir accepté de piloter la voiture après trois jours passés dans la forêt de l’Evros, à la frontière gréco-turque, sans eau, ni nourriture. Il était un des seuls à avoir le permis. Les autres migrants l’ont supplié, ils ne voulaient pas rester plus longtemps dans cette zone où ils risquaient à tout moment d’être renvoyés de force par les gardes-frontières grecs vers la Turquie.
Une campagne soutenue par cinquante ONG
« Mon père avait décidé de fuir l’Iran pour nous rejoindre, ma sœur et moi, qui étions en Allemagne. Malheureusement, il n’y avait pas de voie légale pour qu’il vienne en Europe », raconte Mahtab, arrivée en 2018 avec un visa en Allemagne pour étudier la musique. Homayoun Sabetara était dans une situation de grande vulnérabilité lorsqu’il a décidé d’entreprendre ce dangereux périple. Il venait d’être diagnostiqué d’un cancer et s’est retrouvé soudainement au chômage.
« Mon père a eu des problèmes lors du changement de gouvernement en Iran. Le poste qu’il avait à l’aéroport de Téhéran était hautement politique et il a été viré. Puis, parce qu’il a refusé de payer des dessous-de-table au gouvernement pour conserver son entreprise informatique, elle lui a été confisquée. Ma mère venait de mourir et il était seul. Il n’avait pas le courage de rester dans ces conditions en Iran », explique Mahtab qui, depuis trois ans, a lancé une campagne, soutenue par cinquante ONG, pour que son père ait droit à un procès équitable.
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