Emmanuel Macron a jugé jeudi « brutale et infondée » la décision de Donald Trump d’augmenter les droits de douane, à l’ouverture d’une réunion avec des responsables des principales filières affectées par ces mesures, organisée à l’Elysée.
« Une chose est sûre, avec les décisions de cette nuit, l’économie américaine et les Américains, qu’il s’agisse des entreprises ou des citoyens, sortiront plus faibles qu’hier et plus pauvres », a déclaré le chef de l’Etat, appelant les Européens à « rester unis » dans ces circonstances. « Tous les instruments sont sur la table » pour riposter, y compris la suspension des investissements aux Etats-Unis, a-t-il poursuivi, annonçant une « riposte européenne » en « deux étapes ».
« La première riposte aura lieu mi-avril. Elle porte sur les taxes déjà décidées, en particulier sur acier et aluminium ». « La deuxième réponse, plus massive, celle aux tarifs annoncés hier, se fera à la fin du mois après une étude précise, secteur par secteur ».
L’inquiétude des milieux économiques était générale au lendemain des annonces du président américain, qui a imposé des taxes de 10 % minimum sur toutes les importations et de 20 % pour les produits en provenance de l’Union européenne.
Dans une déclaration transmise à l’Agence France-Presse (AFP) avant la réunion, le président du Medef, Patrick Martin, juge lui aussi ces mesures « d’une extrême gravité pour l’économie européenne et probablement pour l’économie américaine elle-même ». Il prône à la fois « une négociation ferme » avec les Etats-Unis et la mise en place de mesures de soutien aux secteurs concernés.
La réunion de l’Elysée regroupe les représentants du patronat et des filières aéronautique, industrielle, agricole et viticole, ainsi que de la chimie, de l’électronique, de la métallurgie, de la santé et des cosmétiques. Elle se déroule en présence du chef du gouvernement, François Bayrou, et des ministres de l’économie, de l’agriculture, de l’industrie et du commerce extérieur. Le premier ministre a, pour sa part, dénoncé « une atteinte à l’idée que nous nous faisions de la stabilité du monde, en tout cas occidental ».
« Un impact énorme sur l’emploi »
Pour Emmanuel Guichard, de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), « il y aura forcément un impact pour l’industrie cosmétique (…) Il sera avalé soit par l’inflation, soit par la baisse des volumes vendus [aux] Etats-Unis, notre premier marché à l’export », a-t-il déclaré à l’AFP.
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Le secteur automobile, qui sera touché par une surtaxe spécifique de 25 %, n’était pas représenté à la réunion. A la Bourse de Paris, le CAC 40 accusait le coup, perdant près de 3 % à quarante minutes de la clôture.
Les Etats-Unis étaient en 2023 le 4e marché de la France, derrière l’Allemagne, l’Italie et la Belgique, selon les douanes françaises. Parmi les secteurs les plus exposés figurent l’aéronautique (avec 9 milliards d’euros en 2024, il représente un cinquième des exportations de la France vers les Etats-Unis), le luxe (parfums, maroquinerie, etc.), les vins et le cognac.
« Nous évaluons les impacts potentiels », a déclaré jeudi à l’AFP un porte-parole d’Airbus. « Nous vendons aux Etats-Unis, nous fabriquons, nous assemblons, nous développons aux Etats-Unis, comme peu d’autres entreprises », avait expliqué en février le PDG de l’avionneur européen, Guillaume Faury.
En ce qui concerne les vins et les alcools distillés français, les Etats-Unis sont le premier importateur. En 2024, 2,4 milliards d’euros de « vins de raisin » ont traversé l’Atlantique, auxquels il faut ajouter 1,5 milliard d’euros de « boissons alcoolisés distillées », notamment le cognac. La Fédération française des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS) craint « un recul des exportations d’environ 800 millions d’euros », avec « un impact énorme sur l’emploi et l’économie du secteur ». D’après les annonces faites mercredi, Donald Trump semble avoir abandonné l’idée d’une taxation à 200 % des alcools européens qu’il avait envisagée à la mi-mars.