« Doliprane c’est notre bébé, gardons le »: des salariés de plusieurs sites de production de ce médicament, que le groupe Sanofi entend céder, ont répondu jeudi à l’appel à la grève des syndicats, malgré les tentatives du gouvernement et du géant pharmaceutique français de les rassurer sur leur avenir.
Sanofi a annoncé la semaine dernière négocier avec le fonds d’investissement américain CD&R afin de lui céder potentiellement 50% d’Opella, sa filiale qui commercialise une centaine de marques de produits sans ordonnance dans le monde, dont le Doliprane (paracétamol) en France.
Les syndicats craignent une « casse sociale » dans les 1.700 emplois que compte Opella sur le sol français, dont 500 sur son site de Compiègne (Oise) et 250 dans son usine de Lisieux (Calvados), dédiée à ce médicament le plus vendu en France.
« Aujourd’hui on est là, demain on n’est plus là », résume Johann Nicolas, délégué syndical CGT Sanofi Lisieux, devant l’usine en grève de Lisieux, où 80 personnes étaient mobilisées, filtrant l’entrée des poids-lourds.
« La santé n’est pas une marchandise », revendique une banderole CGT accrochée aux grilles, en ce premier jour de grève reconductible, non loin d’un campement improvisé avec des tentes entourées de gros tas de pneus et palettes.
Sur le site Sanofi de Mourenx (Pyrénées-Atlantique), qui emploie une soixantaine de salariés et tourne 24h/24h, l’appel à la grève se manifeste par des débrayages successifs, sur chaque tranche horaire de travail.
Les syndicats ont aussi prévu un rassemblement sur le site de l’usine de Compiègne (Oise) entre 13H00 et 15H00, avec la venue du député Nouveau Front populaire François Ruffin.
« Scandaleux »
Venue « pour défendre notre patrimoine et pour garder notre travail », Isabelle Glais, technicienne, aurait espéré que l’Etat « bouge un petit peu plus pour nous garder en France (…) parce que Doliprane c’est notre bébé ».
« Il est scandaleux qu’on laisse partir des boîtes comme ça sur nos territoires », dénonce le secrétaire général de l’Union départementale FO du Calvados, Mickaël Robe.
L’annonce stratégique de Sanofi, nouvel exemple du recentrage de la « Big Pharma » sur l’innovation, a rapidement pris une tournure politique étant donné la popularité de ce médicament utilisé pour soulager la douleur et la fièvre.
Ce projet fait en outre écho aux enjeux de politique sanitaire dans un contexte déjà marqué par des difficultés d’approvisionnements de certains médicaments, dont des pénuries de paracétamol à l’hiver 2022/23.