- À partir du 1ᵉʳ janvier, il ne sera plus possible d’avoir des aides pour installer une chaudière bois.
- La filière manifeste jeudi contre cette décision à Paris, arguant qu’elle menace 50 000 emplois en France.
- Parmi les arguments avancés pour mettre fin à ces aides : la disponibilité de la ressource bois, disputée par d’autres usages. Mais cette question fait débat.
« Une décision incompréhensible
. » Depuis l’annonce, le 8 septembre dernier, de la fin des aides pour installer chez soi une chaudière bois au 1ᵉʳ janvier 2026, le Syndicat français des chaudiéristes biomasse (SFCB) ne décolère pas. Il a d’ailleurs appelé la filière bois-énergie à manifester jeudi matin à Paris, pour dénoncer cette situation.
« À travers cette décision (…) c’est le pouvoir d’achat des Français qui est raboté, des milliers d’emplois qui menacent d’être déracinés de nos usines et de nos forêts et un levier puissant de décarbonation du chauffage qui est brûlé sur l’autel d’une décision incompréhensible
« , écrivent Hervé Le Horgne, Thomas Perrissin et Nicolas Willerval, tous trois porte-parole du SFCB et respectivement dirigeants de Hargassner France, ÖkoFEN France et Heizomat France. « Exclure les chaudières bois haute performance des systèmes aidés par MaPrimeRenov’, c’est tirer un trait sur un chauffage écologique local et sur une énergie renouvelable bon marché, au moment où l’on cherche à sortir du gaz et du fioul sans porter atteinte au pouvoir d’achat
« , poursuivent-ils.
Du bois pour tout le monde ?
Le gouvernement Bayrou a en effet choisi en septembre d’écarter l’isolation des murs et l’installation de chaudières biomasse (bois et granulés) de la liste des travaux éligibles. Les aides pour l’installation de poêle à bois ou à granulés ont, elles, été maintenues.
À l’époque, le ministère du Logement avait justifié cette décision par le fait que ces systèmes étaient moins coûteux qu’une chaudière, et en raison d’un budget contraint. En France, entre 300 000 et 500 000 personnes sont chauffées au bois, et 10 000 chaudières bois sont installées chaque année.
Mais d’autres arguments, en dehors des raisons budgétaires, sont avancés. Parmi ceux-ci, se trouve le sujet de la concurrence des usages. « Il n’y aura pas assez de bois pour tout le monde
« , commente ainsi une source gouvernementale. Chauffage, capacité à produire de l’électricité, du chauffage, du biocarburant et du biogaz… les usages de la biomasse sont en effet nombreux.
« Certains martèlent ce discours selon lequel il n’y aurait pas de bois pour tout le monde
, confirme Thomas Perrissin, dirigeant de ÖkoFEN France, un fournisseur d’équipements de chauffage. Mais cela dépend des hypothèses qui seront retenues : si on décide de faire voler tous les avions avec de la biomasse, alors oui, on aura un problème de ressource. Si on fait rouler toutes les voitures avec un e-ethanol de troisième génération à base de biomasse forestière, aussi. Il y a des choix à faire
. »
Des rénovations pour consommer moins de bois
D’autant que la filière chaudière bois n’est pas si consommatrice, disent ses défenseurs. « La consommation de bois domestique baisse
, relativise ainsi Thomas Perrissin. Les logements seront de mieux en mieux isolés, donc on aura moins besoin de bois. Enfin, même si on vendait 10 000 chaudières par an, ça ne mettrait pas en danger la ressource et cela permettrait à la filière de tenir et d’offrir aux Français un choix alternatif à la pompe à chaleur
. » Le dirigeant craint que l’arrêt des aides ne pousse les Français vers « des équipements de mauvaise qualité et peu performants
» et ne menace les emplois de 50 000 personnes en France, qui travaillent dans la filière du bois-énergie (plus large que les seules chaudières bois).
« Le scénario Afterres2050 de l’association Solagro, qui fait référence, montre qu’on capte 50% de l’accroissement annuel des forêts, et on peut aller à 70% sans pb environnementaux, ce qui laisse des volumes colossaux, principalement en plaquettes et granulés,
défend aussi un expert du secteur de la rénovation énergétique. Si on ne veut pas surconsommer du bois de chauffage, il faut… rénover performant ! On divise par 4 à 10 les consommations de chauffage
. »
Quant à l’autre critique à l’encontre des chaudières bois, à savoir les émissions particulaires qui émanent de ce mode de chauffage, le responsable de ÖkoFEN France relativise : « 80% des émissions sont liées à des appareils datant d’avant 2005, aujourd’hui, ils émettent 100 fois moins.
«
La filière dénonce la stratégie française d’avoir tout misé sur l’électrique, et sur les pompes à chaleur. Emmanuel Macron a ainsi annoncé l’an dernier sa volonté de produire en France un million de pompes à chaleur d’ici à 2027. « La filière a joué de toutes ses forces pour peser dans ce débat
« , commente Thomas Perrissin. « La foi en la toute puissante électricité (via la PAC) comme outil magique tient à une religion et plus à des éléments rationnels…
« , analyse un expert. La filière espère être entendue par le nouveau ministre du Logement, Vincent Jeanbrun.









