A Reims (Marne), Régine Pinna, Alexis Attimont et Lucie Mas ont rendez-vous au fond de l’usine désaffectée qui héberge leur club d’aviron. Après les bateaux à 15 000 euros et le bassin d’entraînement, on atteint la salle d’honneur, une enceinte bondée de rameurs d’intérieur, outil d’entraînement quotidien. Au plafond, les poutres sont décorées de pagaies. Le postérieur sur le siège, la poignée fermement agrippée, les petons dans les cale-pieds : le trio entame son cours d’Avifit, une séance de rameur, composée de plusieurs séries, et en musique. « Après l’échauffement, on fera quatre minutes par exercice, rappelle la coach Mylène Besson. D’abord les bras, puis les jambes, et les abdos. »
Les yeux rivés sur la professeure, Régine, Alexis et Lucie reproduisent chaque mouvement. D’abord, des moulinets, pour travailler les avant-bras. Ensuite, on tire la poignée dix fois. Puis, le trio se lève pour six squats (flexion des jambes), se rassied pour dix crunchs (exercice de musculation des abdos), avant d’enchaîner avec la planche, mains au sol et pointes de pieds sur le siège. « Allez Régine ! Promis, t’auras un petit chocolat à la fin ! », taquine Mylène Besson. Comme sur un air de samba, le bruit des rails se mêle au souffle des élèves et aux sonorités énergisantes libérées par la grande enceinte. Des visages rougis, des mâchoires serrées, éclat de rire et… stop ! La série est terminée, la musique ralentit, trois secondes pour souffler, et ça repart : maintenant, on s’attaque aux cuisses. « T’as un objectif aujourd’hui, Alexis ? », interroge la coach, facétieuse. « 7 500 mètres », lâche l’entrepreneur.
Lancée par la Fédération française d’aviron (FFA) en 2015, l’Avifit, contraction d’ « aviron » et « fitness », se pratique désormais dans 150 clubs selon la Fédération. Au Cercle nautique des régates rémoises, l’ambiance festive tranche avec l’image du rameur tel qu’il est perçu dans notre société : celui d’une machine rude, ingrate et peu attrayante. « Dans le canotage, comme on l’appelait au XIXe siècle, on est dans un rapport à la nature, tout le contraire du rameur », rappelle Raphaël Verchère. Selon le philosophe du sport, le geste du rameur rappelle le mythe de Sisyphe. « Il s’épuise à pousser une pierre vers le sommet d’une montagne, sauf qu’elle finit toujours par retomber. Dans le rameur ou le vélo d’appartement, on fournit aussi un effort infini, mais on reste sur place, c’est aussi absurde. »
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