Le Parlement se prépare à une adoption au pas de charge en début de semaine d’une loi spéciale, rustine législative qui permettra de financer provisoirement l’Etat et les administrations, après l’échec des discussions entre l’exécutif, les députés et les sénateurs sur le budget de l’Etat.
Les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont déjà adressé pendant le week-end à leurs membres des convocations pour auditionner, lundi et mardi, le ministre de l’économie, Roland Lescure, et pour examiner le projet de loi, avant même qu’il ne soit officialisé par le gouvernement.
La loi spéciale autorise l’Etat à percevoir les impôts existants, sans nouvelles mesures fiscales, et s’accompagne d’un décret limitant les dépenses aux services votés l’année précédente et jugés indispensables pour poursuivre l’exercice des services publics.
Mis en échec sur sa stratégie visant à faire émerger un compromis parlementaire sur le budget, le premier ministre, Sébastien Lecornu, n’a pas annoncé formellement qu’il aurait recours à cette loi spéciale. « Je réunirai, à partir de lundi, les principaux responsables politiques pour les consulter sur la marche à suivre pour protéger les Français et trouver les conditions d’une solution », s’était-il limité à dire vendredi, en prenant acte du désaccord entre députés et sénateurs sur le projet de budget.
Un conseil des ministres est toutefois prévu lundi en fin de journée, dès le retour du président Emmanuel Macron d’Abou Dhabi, où il effectue sa traditionnelle visite de fin d’année aux troupes déployées à l’étranger. Le projet de loi spéciale devrait ainsi être validé à cette occasion. Les débats commenceront dans la foulée à l’Assemblée nationale en vue d’un vote dans l’hémicycle puis au Sénat, mardi en fin de journée.
Concertations dimanche, conseil des ministres lundi, débats mardi
Les concertations avec les forces parlementaires commencent dès dimanche 21 décembre, avec les chefs des groupes parlementaires Renaissance et Horizons, Gabriel Attal et Paul Christophe, a fait savoir l’entourage de Sébastien Lecornu. Le parti Les Républicains (LR) et le MoDem seront reçus lundi, tout comme le Parti socialiste (PS) qui a rendez-vous à 10 h 30, ainsi que Les Ecologistes, a priori vers 16 heures, selon des sources au sein des deux partis.
Au-delà de cette loi de court terme, qui permettra de lever les impôts et d’engager des dépenses sur la base du budget 2025, Sébastien Lecornu doit trouver une issue à l’impasse budgétaire et éviter de nouvelles longues tractations en début d’année.
Sa stratégie a fonctionné pour le budget de la Sécurité sociale, voté le 16 décembre grâce à l’appui du PS et au prix de concessions sur la réforme des retraites, suspendue, et sur l’article 49.3, écarté. Mais le recours à cet outil constitutionnel, qui permet de faire passer un texte sans vote sauf motion de censure, est à nouveau au centre du débat.
La droite pousse Sébastien Lecornu à en faire usage en début d’année sur le budget de l’Etat afin de sortir rapidement d’un processus jugé interminable et souvent incompréhensible par de nombreux Français. « Ce que je demande à Sébastien Lecornu, c’est de faire machine arrière et de se saisir du 49.3 pour donner un budget responsable au pays, conforme à l’intérêt de la nation, avec moins d’impôts et de dépenses », a martelé dans un entretien à Ouest-France le président de LR, Bruno Retailleau.
Des questions constitutionnelles
Ce que précise Philippe Juvin, rapporteur LR du budget à l’Assemblée nationale, dans Le Parisien : « Une loi spéciale mardi, puis un deal sur quelques principes de base à partir de la négociation, qui pourrait être converti par un 49.3 en janvier prochain. »
Sébastien Lecornu dispose d’une autre voie, celle qui consisterait à faire passer le budget par ordonnances, des textes à portée législative mais qui ne sont pas votés par le Parlement. La procédure n’a jamais été utilisée et pose des questions constitutionnelles. Elle semble donc risquée. Au contraire de la loi spéciale qui avait déjà été utilisée en 2024 après la chute du gouvernement de Michel Barnier, renversé par une motion de censure.












