APPLE TV+ – À LA DEMANDE – SÉRIE
Les séries ont ceci de bien qu’elles sont perméables au temps qui passe et que, dans le meilleur des cas, c’est une relation durable qui s’installe entre personnages et téléspectateurs. Comme celle qui lie désormais l’abonné Apple TV+ aux sœurs Garvey, cinq Irlandaises sur lesquelles le sort semble s’acharner, puisque, après avoir réussi à se dépêtrer de la mort suspecte du mari abusif de l’une d’entre elles, c’est d’un autre poids mort qu’elles vont, en saison 2, devoir se défaire.
A moins que la personne en question ne soit pas tout à fait morte, puisque, dans les premières images de la saison 2, le corps bouge encore. Telle The White Lotus, Bad Sisters s’amuse avec les codes du murder mystery en entretenant soigneusement − et longtemps − le doute autour de l’identité de la victime.
La série s’ouvre sur le bonheur retrouvé de Grace (Anne-Marie Duff), l’ancienne épouse brimée, rayonnante alors qu’elle convole en secondes noces avec Ian, un type bien sous tous rapports, et que la menace de la découverte par la police de son rôle dans la mort de son ex-mari semble s’être à peu près éloignée. On ne sortira donc pas indemne du coup de théâtre de l’épisode 2, qui prive la série d’un de ses personnages-clés et met fin à l’état de grâce. L’événement, sidérant, ouvre la voie à une nouvelle enquête, qui opposera cette fois un duo de flics mal assortis aux sœurs Garvey, avec une conclusion à peu près similaire à celle de la saison 1 : la masculinité toxique tue.
Verve comique et burlesque
La seconde saison, toujours scénarisée par Sharon Horgan (qui joue également le rôle d’Eva, la sœur aînée), a toutefois l’intérêt d’emprunter des chemins différents de la première, essentiellement grâce à de nouveaux personnages secondaires (et l’addition réjouissante de Fiona Shaw au casting), tout en continuant à travailler des situations dans lesquelles les larmes se mêlent aux éclats de rire. Cela tient beaucoup à Sharon Horgan, merveilleuse de précision, d’émotion et de générosité dans ce rôle taillé sur mesure, mais aussi à Eve Hewson qui, dans le rôle de la benjamine, se pose en sérieuse concurrente. Ces deux-là font que, dans leurs meilleurs moments, les sœurs Garvey n’ont pas grand-chose à envier aux Marx Brothers.
La verve comique et burlesque de Bad Sisters ne fait pourtant pas oublier la gravité du sujet, et la série continue, à travers cette enquête qui menace, une fois de plus, d’envoyer les sœurs en prison, de régler ses comptes avec le patriarcat et, accessoirement, avec le catholicisme irlandais. Au risque d’un certain manichéisme, tant le portrait que fait Bad Sisters de la gent masculine est affligeant. De la même manière, la façon qu’a la série de démontrer que les vrais gentils n’ont pas toujours la tête de l’emploi et se dissimulent parfois derrière les manières sèches d’un flic obtus ou la mine triste d’un soupirant éconduit est un peu convenue.
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