INTERNATIONAL – Une affaire qui témoigne de la volonté du nouveau président américain de museler le soutien pro-palestinien sur les campus universitaires américains. Elle s’appelle Rumeysa Ozturk. Mardi, cette étudiante de 30 ans était arrêtée par surprise par des policiers chargés de la conduire dans un centre de l’ICE (les services de l’immigration) pour procéder à sa future expulsion vers son pays d’origine.
La révélation de cette affaire, par un journaliste qui a filmé la scène d’arrestation de cette étudiante de confession musulmane et originaire de Turquie, provoque depuis une vague d’émotion d’ampleur dans le pays. Une émotion encore renforcée par les conditions de cette arrestation sous forme d’embuscade, racontées par CNN ce samedi 29 mars.
Aux États-Unis, l’arrestation filmée de l’étudiante propalestinienne Rumeysa Ozturk choque
Du Massachusetts à la Louisiane
La chaîne américaine dévoile en effet le parcours sans fin de la jeune femme pour atterrir dans le centre de traitement ICE de South Louisiana à Basile, dans l’État de Louisiane. Un lieu situé à 2 400 kilomètres de chez elle. Et le récit débute par de nouveaux détails sur l’arrestation en elle-même, organisée par les forces de l’ordre alors que Rumeysa Ozturk se rendait chez des amis pour rompre le jeûne du Ramadan mardi soir. Dans la rue, elle est encerclée par six policiers en civil et cachés pour la plupart par des lunettes de soleil et des masques sur le visage, comme on peut le voir sur des images de surveillances relayées par CNN.
Embarquée dans un véhicule, l’étudiante − pourtant titulaire d’un visa étudiant F-1 valide − débute un long périple « à travers plusieurs États », comme le rapportent ses avocats. Finalement placée dans un avion le lendemain matin, elle s’envole alors à 2 400 kilomètres de chez elle pour rejoindre un premier centre de transit à Alexandria, en Louisiane. Les policiers l’ont ensuite conduit jusqu’au centre des services de l’immigration de Basile, en Louisiane.
CNN explique que ce long trajet ne s’est pas passé sans encombre. Asthmatique, la jeune femme a été victime d’une crise durant le voyage. Une information dévoilée vendredi par une requête en habeas corpus. Sauf que durant ce long transport, l’étudiante n’a jamais été inculpée et n’a pas eu le droit de s’entretenir avec un avocat, comme s’en émeuvent désormais les conseils de la doctorante en études de l’enfance et développement humain qui devait terminer son doctorat dans huit mois.
Procédure bloquée (pour l’instant)
Avant cela, ses proches, inquiets, ont cherché en vain à retrouver sa trace. « Les amis de Rumeysa Ozturk l’ont cherchée frénétiquement », indique d’ailleurs CNN. Le début d’un jeu de piste infernal pour ses proches et ses avocats : après avoir sondé les hôpitaux de l’État compte tenu de son asthme, ils se sont tournés vers les registres de l’ICE, dont le système de localisation des détenus évoquait sa détention, mais sans préciser d’établissement. 24 heures d’angoisse qui ont pris fin mercredi soir quand elle a enfin pu s’entretenir avec ses avocats.
Mais si aucune charge n’a été retenue contre elle, selon l’un de ses avocats, son visa a bien été révoqué le 21 mars, soit cinq jours avant son arrestation. Moment où elle a finalement reçu cette convocation en vue de son expulsion par les policiers. La raison ? Selon un porte-parole du Département de la Sécurité intérieure, elle se serait « livrée à des activités de soutien au Hamas », sans préciser lesquelles. « Son arrestation et sa détention s’inscrivent dans une stratégie concertée et systématique de l’administration Trump visant à punir les étudiants identifiés pour activisme pro-palestinien », déplorent quant à eux les avocats de Rumeysa Ozturk.
Le 26 mars 2024, l’étudiante avait en effet écrit un éditorial dans le journal de son école pour critiquer la réponse de l’université Tufts aux demandes étudiantes pour se désinvestir des entreprises liées à Israël en raison du conflit à Gaza. Mais pour le secrétaire d’État Marco Rubio interrogé sur l’affaire jeudi, elle serait impliquée dans des manifestations étudiantes perturbatrices.
Depuis vendredi, la procédure d’expulsion est toutefois bloquée par une juge de Boston, qui souhaite d’abord s’assurer que son tribunal est compétent pour décider si elle a été légalement détenue. Rumeysa Ozturk doit désormais comparaître devant le tribunal de première instance de Louisiane le 7 avril prochain.
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