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« Les deux accusés proclament leur innocence depuis huit ans, ils ont été condamnés, ils ont fait appel. C’est un droit, mais c’est aussi un risque », avait prévenu lundi 10 juin l’avocate générale, Naïma Rudloff, en ouvrant le réquisitoire du procès en appel de l’attentat au camion-bélier qui avait fait quatre-vingt-six morts sur la promenade des Anglais, à Nice, le 14 juillet 2016. Ce procès, qui s’est ouvert le 22 avril devant la cour d’assises spéciale de Paris, est entré dans sa huitième et dernière semaine.
De fait, la magistrate a demandé que les deux accusés, Mohamed Ghraieb, un réceptionniste d’hôtel franco-tunisien, et Chokri Chafroud, un migrant tunisien travaillant dans le bâtiment, soient condamnés à la peine maximale prévue pour « association de malfaiteurs terroriste », soit vingt ans de réclusion criminelle. En première instance, les deux hommes avaient été condamnés à dix-huit ans de réclusion le 13 décembre 2022, une peine supérieure aux réquisitions du Parquet national antiterroriste, qui en avait alors requis quinze.
Aux yeux du ministère public, Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud, deux amis de l’auteur de l’attentat, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, qui a été tué par les forces de l’ordre, ont apporté à ce dernier « un soutien logistique et un soutien idéologique ». Le soutien logistique d’abord : ils ont tous les deux été sollicités – en vain – par le terroriste qui cherchait à se procurer une arme, et ils ont tous deux été associés à la location du camion que Mohamed Lahouaiej-Bouhlel précipitera sur la foule rassemblée pour le feu d’artifice du 14-Juillet.
« Complotisme » et « ressentiment »
La question de leur motivation idéologique est plus délicate. Ce dossier terroriste se distingue en effet de l’immense majorité des attentats djihadistes par la faible imprégnation idéologique de ses acteurs. Mohamed Ghraieb est marié à une Finlandaise protestante, et Chokri Chafroud a déjà écrit à Mohamed Lahouaiej-Bouhlel qu’il « détest[ait] les Arabes ». S’ils n’apparaissent pas à première vue particulièrement radicalisés, l’avocate générale voit un autre levier ayant pu les emmener sur le chemin de la terreur.
« Les accusés ont beaucoup de traits communs avec Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, en premier lieu le complotisme, une constante dans les dossiers de terrorisme, a-t-elle poursuivi pour tenter de dessiner leur mobile. Chez ces trois hommes, on retient le ressentiment, la victimisation, la duplicité et un sens moral défaillant, tous les leviers puissants qui peuvent mener au terrorisme… »
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